Tortillas et bines noires
Cédric Frenette-Dussault
Enfin! Après un an de préparatifs et d'implication au sein d'Écologie
sans frontières, nos pieds ont foulé le sol guatémaltèque pour la première
fois au début du mois de mai. C'est avec le coeur rempli d'allégresse et
équipés de sacs à dos pleins de «caneçons» propres que nous sommes partis à
la découverte autonome des écosystèmes de ce petit pays d'Amérique centrale.
Il est important de souligner l'originalité et l'audace de ce voyage-ci.
Traditionnellement, les groupes d'Écologie sans frontières sont composés
d'étudiantes et d'étudiants du baccalauréat en écologie. Toutefois, cet été,
l'équipe Guatemala 2005 compte quatre écologistes et quatre psychologues,
dont seulement un pauvre représentant du sexe masculin. Notre projet
consiste principalement à appuyer les populations guatémaltèques à protéger
leurs sources d'eau potable et à étudier les mécanismes organisationnels des
communautés rurales.
Le 5 mai, nous étions accueillis à Huehuetenango par les professeurs Juan
Carlos Gálvez Gordillo et Carmen Carrasco ainsi que par «l'éclaireuse»
d'Écologie sans frontières, Karen Ann Page. Pendant une semaine, en pension
dans des familles, nous avons travaillé à peaufiner notre espagnol, quelque
peu lacunaire, et à soigner nos pauvres petits intestins en processus
d'adaptation dans la capitale nationale des pétards à quatre heures du matin
: nous apprendrons plus tard que c'est pour célébrer des anniversaires et
non parce qu'il se produit une révolution. Ce fut une semaine assez
épuisante, mais entre deux leçons d'espagnol, le seul homme du groupe prit
quand même le temps de danser le mérengué avec Miss Guatemala 2005.
Maintenant fin prêts et avec un espagnol qu'on qualifiera de fonctionnel,
nous nous sommes rendus à Concepción Huista, municipalité montagnarde
maintenant reconnue par chacun d'entre nous pour les qualités sanitaires de
sa gastronomie locale. Pauvres petits intestins fragiles... Après une nuit
dans nos petites chambres glauques, le groupe dut se séparer et partir dans
deux villages différents. Adieu eau chaude!
Le premier groupe partit, le coeur gros, vers Onlaj, ville des nuages.
Pour celles et ceux qui pensent qu'il fait chaud partout au Guatemala, eh
bien, sachez ceci : à Onlaj, les filles ne sortent jamais sans avoir tous
leurs vêtements sur le dos! Et pour ce qui est de la douche, c'est un
concept désormais abstrait. Après une semaine, l'eau chaude et le savon sont
plus que bienvenus.
L'autre groupe prit la direction de Petatán, petit aldea bien
installé au fond d'une vallée tranquille. C'est le cas de le dire : nos
vendredis et samedis soirs n'ont jamais été aussi peu mouvementés. Par
contre, nous avons tout le temps voulu pour apprécier la quiétude bucolique
des campagnes guatémaltèques. Une chance qu'on s'est acheté une guitare, un
ballon de basket et un disque de Nirvana!
¡Con permiso!
Des choses étranges, il s'en passe relativement souvent, par rapport à
nos perceptions nord-américaines. Les notions d'espace et de temps sont
complètement différentes. Ici, ce n'est pas dans la philosophie des gens de
contrôler le temps. Les choses sont acceptées comme elles viennent. On
comprend alors mieux pourquoi il est fréquent d'attendre quatre heures pour
une réunion qui n'aura pas lieu. Et que dire des chicken bus qui,
comme leur nom l'indique, recèlent de trucs inusités pour un autobus, en
plus d'être remplis à craquer. Un minibus de dix places contenant
27 personnes, c'est commun. Bonjour odeurs!
De plus, pour celles et ceux en manque d'attention chronique (surtout
celles), le Guatemala est la destination tout indiquée pour vous. Avec notre
petit côté exotique (une tête de plus que tout le monde et le teint blême),
les têtes se retournent immanquablement sur notre passage.
Votre médecin vous a-t-il déjà recommandé un maximum de deux oeufs par
semaine? Ici, on oublie ça! On en mange tous les jours, sans compter les
quantités faramineuses de tortillas et de bines noires baignant dans
un liquide douteux.
Malgré tous ces petits «détails», nous nous plaisons beaucoup au
Guatemala. Les paysages sont superbes, les gens sympathiques et le rythme de
vie agréable. Guatemala, pays de contrastes à découvrir...
À suivre...
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