Une chaire SAQ en valorisation du verre dans les matériaux
GILLES PELLOILLE
La Société des alcools du Québec (SAQ) finance une chaire de recherche à
l'Université afin d'étudier la possibilité de recycler dans la fabrication
du ciment et du béton les dizaines de milliers de tonnes de verre mixte et
coloré récupérées chaque année au Québec.
Ce verre mixte et coloré est considéré comme un enfant pauvre du système
de collecte sélective au Québec du fait que le marché du recyclage de cette
matière est fragile. «Autant le verre incolore est facilement recyclé,
autant la valeur du verre mixte est négative. Nous allons donc étudier
toutes les pistes d'utilisation du verre mixte dans le béton et le ciment»,
explique le titulaire de la chaire SAQ en valorisation du verre dans les
matériaux, Arezki Tagnit-Hamou, professeur au Département de génie civil de
la Faculté de génie.
Selon Arezki Tagnit-Hamou, la composition chimique et minéralogique du
verre mixte peut présenter des propriétés intéressantes dans un béton :
d'une part, comme matrice cimentaire en remplacement d'une fraction du
ciment, d'autre part, comme substitut des granulats. «L'avancement de la
recherche sur les matériaux cimentaires nous permet de réutiliser les
matériaux comme le verre mixte», explique-t-il. Le professeur mènera sa
recherche en mettant à profit sa longue expérience qui lui a déjà permis de
développer de nouveaux matériaux cimentaires à partir de sous-produits
industriels.
En plus de bénéficier du support de la SAQ, la chaire peut aussi compter
sur la collaboration des recycleurs de verre du Québec situés à
Victoriaville, à Longueuil et à Montréal. Au cours des deux premières
années, l'équipe de la chaire SAQ en valorisation du verre dans les
matériaux établira le potentiel et les critères de l'incorporation du verre
dans une matrice cimentaire ou dans le béton. Durant la troisième année de
la chaire, l'industrie des matériaux cimentaires sera intégrée au projet.
Des groupes industriels d'envergure internationale sont déjà intéressés par
les travaux de la chaire.
Cette action coordonnée permettra aussi de former du personnel hautement
qualifié qui intégrera dans sa formation le concept de développement
durable. Enfin, grâce aux travaux de la chaire SAQ, le Québec sera à
l'avant-garde dans la valorisation du verre, ce qui contribuera à réduire
les émissions des gaz à effet de serre générés par les cimenteries.
Le vice-recteur à la recherche, Edwin Bourget, se réjouit que la chaire
SAQ vienne renforcer la position de chef de file de l'Université de
Sherbrooke en recherche sur l'environnement et le développement durable :
«De plus, la construction très prochaine au coût de 16 millions de dollars
du nouveau laboratoire intégré de valorisation de matériaux et structures
innovantes permettra notamment à l'équipe de la chaire de travailler avec
des équipements à la fine pointe de la technologie dans un bâtiment unique
au monde qui se consacrera à la valorisation des sous-produits industriels.»
Pour le vice-président et chef de la direction financière de la SAQ,
Richard Genest, la création de la chaire SAQ à l'Université découle du plan
d'affaires et de la politique environnementale dont s'est dotée la SAQ :
«Nous avons beaucoup misé depuis 1990 sur le soutien à la collecte sélective
et à la récupération du verre, puisque nous y avons investi plus de 12
millions de dollars. Il fallait donc voir à l'étape suivante, soit le
développement de l'industrie de la valorisation du verre et pour y arriver,
il fallait soutenir la recherche. Nous savions par ailleurs que l'Université
de Sherbrooke possédait l'expérience, la sensibilité et les cerveaux pour
abriter une telle chaire. Les travaux de l'équipe du professeur Tagnit-Hamou
nous en font la lumineuse démonstration.»
Arezki Tagnit-Hamou est ingénieur diplômé de l'Institut national des
hydrocarbures et de la chimie de Boumérdes (Algérie) et titulaire d'un
doctorat en technologie et chimie des silicates de l'Université de Veszprém
(Hongrie). Après une expérience industrielle dans les matériaux de
construction, puis l'obtention de son doctorat, il été engagé à l'Université
de Sherbrooke en 1990.
Le professeur, qui possède une expertise mondialement reconnue dans le
domaine du développement des bétons écologiques et de la valorisation des
résidus industriels, est responsable d'une équipe de recherche de
10 personnes. Il est membre du Groupe de recherche sur le ciment et le béton
au sein duquel quatre professeurs mettent en commun leurs différentes
expertises dans le domaine des matériaux de construction. Membre du Centre
de recherche sur les infrastructures en béton, Arezki Tagnit-Hamou est aussi
membre fondateur de l'Observatoire de l'environnement et du développement
durable de l'Université, où il est responsable de l'axe Gestion intégrée des
résidus. L'Observatoire regroupe plus de 80 professeures et professeurs de
calibre international.
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