Liaison, 14 avril 2005
L'ingénierie à la rescousse des tendinites
CHARLES VINCENT
Chaque jour, nous soumettons notre corps à des contraintes physiques.
Lorsqu'elles sont répétées ou violentes, ces contraintes peuvent provoquer
des lésions aux tissus dits conjonctifs mous, c'est-à-dire aux cartilages,
ligaments et tendons. Parmi les plus connues, on trouve les maux de dos,
l'entorse lombaire, le tennis elbow et le syndrome du tunnel carpien.
Normalement, les tissus endommagés sont remodelés et réparés par les
cellules qu'ils contiennent. Cependant, il arrive que la dégradation dépasse
la capacité de guérison et que les tissus se dégénèrent ou se brisent. Dans
ce cas, c'est la visite chez le médecin à coup sûr!
Au Québec, les troubles musculo-squelettiques font environ
45 000 victimes par année au travail, une situation qui, pour la seule
année 2000, a coûté à la Commission de santé et sécurité au travail environ
500 M$ en prestations. Ce à quoi il faut ajouter les autres coûts liés aux
traitements médicaux, à la perte de productivité, à la formation de
remplaçants ainsi qu'à la diminution de la qualité de vie.
L'ingénierie mis à contribution
La problématique en est donc une d'importance et, en ce sens, les
organismes subventionnaires ont sollicité les chercheuses et chercheurs de
diverses disciplines. Parmi ceux-ci, les chercheurs en mécanobiologie et en
génie tissulaire, dont la professeure Ève Langelier, du Département de génie
mécanique.
Spécialisée en physiologie, pathologie et guérison des tissus conjonctifs
mous, Ève Langelier a été engagée comme professeure l'été dernier. Depuis ce
temps, elle partage ses activités entre l'enseignement, les demandes de
subvention et l'installation de son futur laboratoire de mécanobiologie et
biomécanique tissulaire. Elle a aussi été mandatée pour tenir des
midi-rencontres visant à informer et outiller les étudiantes de sciences et
génie pour leur future carrière dans des milieux souvent traditionnellement
masculins.
Ève Langelier étudie l'équilibre qui existe normalement entre la
dégradation et la réparation des tissus, de même que les facteurs perturbant
cet équilibre. «Mon objectif à long terme, explique-t-elle, est d'améliorer
la prévention, la gestion et la guérison des lésions ou maladies du système
musculo-squelettique.»
Plus particulièrement, la jeune professeure étudie l'évolution de la
structure du tissu, de sa réponse aux contraintes mécaniques cycliques de
même que sa dégradation et sa réparation. «En modélisant les données
recueillies, on pourra améliorer notre compréhension des blessures causées
par des mouvements répétitifs, indique-t-elle. La caractérisation de cet
équilibre pourrait également permettre des percées dans le domaine des
prothèses vivantes fabriquées in vitro.»
Un domaine sur lequel elle souhaite aussi travailler. «Je désire
également créer et améliorer les tissus fabriqués in vitro utilisés
en recherche comme modèles de tissus conjonctifs mous de même qu'à titre de
prothèses pour implantation dans le corps humain, poursuit-elle. Un volet de
ma recherche qui pourrait avoir un impact positif sur la pratique des
chirurgies de reconstruction.»
«Le problème, à l'heure actuelle, c'est que les tissus vivants conçus en
laboratoire ne sont pas assez résistants pour supporter les chargements
physiologiques et permettre l'adaptation du tissu, précise la chercheuse.
Ils risquent fortement d'être endommagés si implantés en situation réelle,
dans le corps humain. L'une des solutions à ce problème consiste à les
entraîner, plus spécifiquement, à les remodeler de manière à améliorer leurs
propriétés.»
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