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Liaison, 10 février 2005
Courrier du lecteur
Ton histoire est une épopée!
À l’époque du Frère Untel, ce vers de l’hymne national
canadien avait été transcrit comme suit par un jeune du cours secondaire :
«Ton histoire est une des pas pires!» Sous l’un ou l’autre libellé,
ce vers m’est revenu à l’esprit tout au long d’un livre que j’ai
littéralement dévoré et que l’abbé Lucien Vachon a publié chez Fides
à l’occasion du 40e anniversaire de la Faculté de
théologie de l’Université de Sherbrooke (qui célébrait son 50e).
La Faculté porte maintenant le nom étendu de «Faculté de théologie,
d’éthique et de philosophie» où la théologie a gardé le premier rang au
prix d’une lutte elle-même épique. Car dans cette faculté, c’est non
seulement le nom, mais l’être même qui fut souvent remis en question. Et
l’abbé Vachon a fait de cette lutte un récit fidèle et complet, vivant et
pittoresque.
Il se trouve que, par le même biais, l’ouvrage retrace
plusieurs épisodes agités et dramatiques de l’histoire de notre diocèse,
puisque la fondation de la Faculté réalisait le rêve de Mgr
Georges Cabana, qui voulait en faire l’instrument prestigieux de la
formation des futurs prêtres des diocèses de Sherbrooke, Nicolet et
Saint-Hyacinthe, mais sans sacrifier aucune des caractéristiques d’un
grand séminaire! Il en est résulté une valse, parfois triste parfois
joyeuse, entre les Congrégations romaines, l’Archevêché et l’Université.
Du coup, c’est l’opinion publique de la région et même de la
communauté universitaire qui s’était attachée à l’existence de la Faculté
de théologie, et qui l’a défendue vigoureusement lorsque les tsunamis
budgétaires ont failli la balayer! En une circonstance particulière, il
s’est même produit une étonnante concertation des divers personnels de
l’Université pour protéger la survie de la Faculté.
À son tour, Mgr Fortier a dû naviguer dans des
eaux périlleuses quand il devait défendre à Rome le statut de la Faculté,
et respecter à Sherbrooke les contraintes du statut universitaire, et
surtout quand est survenue la crise relative à la présence de prêtres
laïcisés dans le corps professoral de la Faculté.
Pendant près de la moitié des 40 ans de la Faculté, je me
trouvais moi-même à l’Université et j’ai donc été témoin de plusieurs
étapes de cette histoire mouvementée, ce qui peut expliquer en partie
l’avide curiosité avec laquelle j’ai parcouru le livre de l’abbé Vachon.
Mais cette histoire est aussi révélatrice du climat de toute une époque de
la vie de l’Université et du Diocèse. Je veux justement signaler que
plusieurs prêtres, religieux, religieuses et laïques engagés font partie
de cette histoire, parce qu’ils ont enseigné ou étudié à la Faculté et
qu’ils ont participé à son rayonnement, non seulement sur le campus et
dans la région, mais dans une vaste expansion que la Faculté a prise,
jusque dans les Maritimes et les provinces anglophones, par divers
programmes innovateurs qui lui ont valu une clientèle étudiante toujours
indispensable à sa survie.
L’abbé Vachon se défend d’être un historien, ou un écrivain,
mais comme il a été l’artisan de cette Faculté depuis le début, et à titre
de doyen pendant vingt ans, et comme il a été particulièrement engagé dans
les étapes les plus dramatiques, il a pu, au prix d’un labeur méthodique
et prolongé, produire cet ouvrage qui restera le témoin précieux de la vie
d’une institution et d’une partie de notre histoire régionale,
universitaire et diocésaine. Avec le talent qu’on lui connaît, il
multiplie les réflexions et analyses avec adresse et profondeur et il
invite discrètement le lecteur à dégager lui-même certains jugements sur
les organismes ou les personnes. Vraiment, cette histoire est une épopée,
«une des pas pires!»
Daniel Croteau, prêtre
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