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Liaison, 10 juin 2004
Collation des grades avec ou sans toge
Robin Renaud
La première collation des grades de l'Université a eu lieu le
12 juin 1955. Même si l'Université ne comptait alors pas de diplômés à
proprement parler, l'événement d'une grande solennité a consacré les trois
premiers docteurs d'honneur de l'institution : l'éditeur de journaux Jacob
Nicol, le député provincial John S. Bourque et le père Émile Chartier, un
religieux originaire de la région et oeuvrant à l'Université de Montréal.
En fait, avant 1957, année où les premières cohortes d'étudiants
inscrits ont reçu leur diplôme, un certain nombre de personnalités,
surtout politiques et religieuses, se sont vu décerner des doctorats
honoris causa. Les premiers ministres Maurice Duplessis et Louis
Saint-Laurent furent parmi les premiers à recevoir cet honneur.
L'objectif des administrateurs de l'époque était double. D'une part,
ces événements permettaient de faire connaître au public l'existence de la
jeune université, au moment même où une grande campagne de financement
avait cours. D'autre part, les responsables espéraient que, flattés par
ces hommages, les politiciens soient plus enclins à verser des crédits
budgétaires à l'institution.
Le juge Raynald Fréchette, qui étudiait au séminaire en 1956, se
rappelle le décorum des premières remises de doctorats d'honneur :
«C'était très impressionnant de voir tous les invités avec leur toge et
leur mortier descendre la grande allée de l'auditorium du séminaire. Je me
souviens du premier ministre Louis Saint-Laurent, un libéral, qui avait
profité de la cérémonie pour nommer un de ses vieux amis, John Hackett,
comme sénateur. Il avait surpris tout le monde puisque Hackett était un
bleu notoire.»
Également témoin de cette époque, Marc Bernier se rappelle avoir
assisté au discours du comte Raoul de Follereau : «Apôtre mondial du
traitement des lépreux, il nous a fait une harangue, sans notes, d'une
heure et demie. Il avait frappé notre imaginaire en nous disant avoir
interpellé les dirigeants russes et américains. «Donnez-moi le montant
d'un bombardier, disait-il, et je soignerai les lépreux du monde entier.»
Le rituel de collation des grades a gardé son caractère solennel
pendant plusieurs années. Des centaines de finissants ont déambulé sur la
scène de la grande salle. Toutefois, à la fin des années 1960, les
étudiantes et étudiants y allèrent d'une contestation du cérémonial. Parmi
leurs revendications, ils obtinrent de ne plus porter la toge. Benoît
Garneau, bachelier ès arts en 1970, se souvient bien de cette période
rebelle : «Il fallait à tout prix marquer notre différence. J'étais un peu
gauchiste; je portais fièrement bandeau et verres fumés. Malgré cela,
l'événement était important.»
Les étudiantes et étudiants revendiquaient aussi des collations de
grades pour chacune des facultés au lieu des traditionnelles cérémonies
générales. «Il y a bien eu des cérémonies facultaires quelques années,
mais les dirigeants de l'Université, qui devaient se taper huit collations
deux fois l'an, ont vite ramené les cérémonies générales. Puis, au début
des années 1980, les étudiantes et étudiants demandèrent aussi un retour à
des collations de grades plus formelles, avec toges et mortiers», relate
Marc Bernier.

En arrière-plan, le premier ministre Jean Lesage
prend part à la collation des grades du 14 octobre 1961.
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L'artiste Clémence Desrochers reçoit un doctorat
d'honneur le 10 juin 1994 des mains du recteur
Pierre Reid et de la vice-rectrice Denise Lalancette. |

L'abbé Paul Gilmore, trésorier de l'Université,
remet un doctorat honoris causa au premier ministre
du Canada, Louis Saint-Laurent, le 7 octobre 1956.
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Au tournant des années 1970, les étudiantes
et étudiants refusent de porter la toge lors des collations
de grades. Benoît Garneau y va d'une tenue paradoxale : un costume
impeccable avec des bottes de moto,
des verres fumés et un bandeau.
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Dans les années 1990, des étudiants de la Faculté d'éducation physique
et sportive brandissent
fièrement leur diplôme au terme de la cérémonie.
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Les frères Laurent et Bernard Lemaire, artisans des
succès du groupe Cascades, sont honorés par le doyen
de la Faculté d'administration, Paul Prévost, en 1986.
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L'étudiante athlète non voyante
Julie Cournoyer, accompagnée
de son chien-guide, reçoit son diplôme
des mains de Normand Wener, en 1985.
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Si la plupart des docteurs d'honneur prononcent
un discours lors de la collation des grades, la cantatrice canadienne
Maureen Forester a interprété un lied de Schubert lors d'une cérémonie
tenue en octobre 1985.
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Remise de doctorats d'honneur à la Faculté de médecine le 13 février
1967.
Le doyen Gérald LaSalle remet un doctorat d'honneur à l'éminent
pédiatre français Robert Debré (second) et à son fils Michel Debré,
politicien français (dernier). Les deux lauréats entourent
Jean-Jacques Lussier, doyen de la Faculté de médecine d'Ottawa.
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