Liaison, 8 avril 2004
Le «nouveau» modèle d'université
Liaison reproduit un billet paru dans La Tribune du
27 mars, pour le bénéfice des membres de la communauté universitaire qui
n'auraient pas eu accès à ce texte dans lequel le recteur fait le point
sur la trajectoire historique de l'Université, à l'occasion de son
50e anniversaire.
L'Université de Sherbrooke est-elle à risque de prendre les couleurs
d'une entreprise piégée par les pressions du marché et de la concurrence?
Comment doit-elle se positionner pour demeurer audacieuse et forte,
novatrice et avoir des résultats bien articulés à sa mission?
La trajectoire historique de l'Université est marquée par une
mobilisation constante de partenaires de toutes les sphères d'activité. Et
cela contribue à son profil de «nouveauté» rafraîchissant, qui remonte
tout au début de l'Université.
Sous l'initiative des milieux ecclésiastiques et professionnels,
d'affaires et d'enseignement, l'UdeS résulte de la mobilisation locale des
années 50. Elle est tombée dans la marmite de la coopération comme Obélix
dans la potion magique des irréductibles Gaulois. Il est donc naturel
qu'elle soit chef de file d'un jeune modèle d'université.
Ce modèle, que nous qualifions de «nouveau» par rapport à d'autres
conceptions plus traditionnelles, Sherbrooke l'édifie depuis 50 ans.
Aujourd'hui, nous continuons l'œuvre de nos prédécesseurs en collaborant
avec les milieux, à l'échelon local, régional, national et international.
Par exemple, la campagne de souscription conjointe qui se déploie
présentement à l'échelle des cinq institutions partenaires s'inscrit dans
ce modèle. Elle en est une des nombreuses manifestations, comme le Pôle
universitaire de Sherbrooke, les partenariats municipaux, le Pôle
universitaire de la Montérégie et les partenariats internationaux.
Dès la collation des grades de juin 1958, le recteur d'alors,
Mgr Irénée Pinard, voit les universités coincées «entre les habitudes
traditionnelles qui donnent le primat aux disciplines spiritualistes, et
les théories modernes inclinant vers le pratique et le concret». Devant
cet état de fait, Sherbrooke a voulu «tirer parti des deux formes de
développement».
À la même occasion, le directeur de l'École polytechnique de Montréal,
Henri Gaudefroy, précise que l'Université est née du concours de deux
forces irrésistibles : «Le Séminaire Saint-Charles-Borromée lui apporte la
vigueur du passé, mêlée de la sage pondération et des vertus séculaires
des grands classiques, tandis que le génie la supporte de toute sa fougue
et de son impétuosité, imbu comme il est du désir de son siècle, de
produire et de faire vite et grand avec précision, exactitude et
efficacité. N'est-ce pas là un mariage symbolique qui augure bien de
l'avenir?»
À la collation des grades suivante, en octobre 1958, le chancelier, Mgr
Georges Cabana, ajoute que les contacts avec les anglophones promettent
d'enrichir notre mentalité. «Il faut reconnaître, dit-il, qu'ils ont le
sens pratique, que leur aptitude au commerce et leurs succès dans les
entreprises industrielles représentent un facteur de progrès dans une
région comme la nôtre.»
Voilà des racines qui ont produit le «nouveau modèle» d'université que
les fondateurs ont imaginé, il y a 50 ans, et que les bâtisseurs et
artisans de l'Université ne cessent de construire depuis ce temps. La
force de ces racines était telle, que l'on voit aujourd'hui une grande
communauté de personnes s'ingénier à faire grandir un arbre dont les
branches se déploient maintenant sur trois campus pour la formation dans
les domaines appliqués comme fondamentaux. Oui, l'audace du début porte
fruit, dans une constante dynamique de concertation et de complémentarité
des divers champs d'intérêt!
Renier aujourd'hui nos fondements distinctifs équivaudrait à couper la
branche sur laquelle notre communauté est assise...
Bruno-Marie Béchard, ing.
Recteur de l'Université de Sherbrooke
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