|
Liaison, 19 février 2004
Encourager les échanges d'idées
Lieu de recherche et d'enseignement, l'Université constitue également
un endroit où des occasions sont mises de l'avant pour échanger des points
de vue et débattre différents enjeux. Le Débathon affrontant quatre
professeurs sur la question Le rôle premier de l'Université est-il d'abord
l'enseignement ou la recherche? et les premiers débats parlementaires
canadiens à se tenir à Sherbrooke témoignent de cette volonté d'encourager
les échanges d'idées.
CATHERINE LABRECQUE
Sami Aoun, professeur de sciences politiques, et Nathalie Vézina,
vice-doyenne aux affaires étudiantes et secrétaire de la Faculté de droit,
argumentaient en faveur de l'enseignement comme rôle premier de
l'Université, le 5 février au Carrefour de l'information. De leur côté, Jean
Goulet, doyen de la Faculté des sciences, et Serge Charlebois, professeur au
Département de génie électrique et de génie informatique, défendaient le
point de vue de la recherche comme rôle premier de l'Université.
Jean Goulet a d'abord donné ses arguments : «À l'Université, la question
est la suivante : Qui embaucher entre le bon chercheur qui n'est que bon
pédagogue et un bon chercheur qui est moins bon pédagogue? Je vais embaucher
le chercheur puisque le pédagogue ne saura pas passionner les étudiantes et
étudiants et renouveler la matière, et ne rendra donc pas service aux
étudiants.» Sami Aoun a réfuté : «Le pédagogue peut être à la fois proche
des laboratoires, des chaires de recherche et des étudiants du baccalauréat,
de maîtrise ou de doctorat. Je vois mal comment un doctorant pourrait
encadrer les étudiantes et étudiants au doctorat s'il n'a pas de pédagogie.
Avec Internet et la multitude d'ouvrages de référence, les étudiants ont
surtout besoin d'un pédagogue qui les aidera à faire la différence entre ce
qui est rigoureux et ce qui l'est moins.»
Nathalie Vézina a quant à elle rappelé la fonction de l'Université :
«C'est une institution d'enseignement qui s'adresse d'abord aux étudiantes
et étudiants et qui vise à faire avancer leur savoir. L'Université a besoin
de pédagogues pour faire connaître la matière aux étudiants. Si ces derniers
ont des enseignants ennuyants au premier cycle, ils ne souhaiteront pas
poursuivre leurs études, et il n'y aura pas de chercheurs. Les pédagogues
font aimer la matière, donnent le goût aux étudiants de s'impliquer dans la
société», a-t-elle affirmé.
En finale, Jean Goulet a fait une analogie entre l'université et le
milieu sportif : «La grande question est de savoir ce qui stimule un
étudiant : un chercheur ou un pédagogue? Dans le milieu sportif, qu'est-ce
qui stimule une étudiante ou un étudiant à faire du sport? Ce sont les Jeux
olympiques. Voir un athlète aller au bout de ses rêves et se dépasser
stimule énormément. C'est la même chose dans une université. Le contact avec
le chercheur qui veut aller au bout d'un sujet va stimuler un étudiant.» Du
tac au tac, Sami Aoun a réfuté cet énoncé : «Un pédagogue peut donner un
savoir qui n'est pas lié aux intérêts utilitaires, mais qui alimente la
culture. Il met les balises pour que la recherche ne soit pas seulement
fantaisiste, mais en accord avec les espérances de la société.»
Le public de l'Agora a par la suite voté selon les arguments du débat.
L'équipe prônant l'enseignement a gagné par deux votes.
Premier débat parlementaire
Du 6 au 8 février, une trentaine d'étudiantes et d'étudiants de cinq
universités et collèges ont participé au premier Tournoi de débat
parlementaire de l'Université. En organisant l'événement, le groupe Débathon
a souhaité donner le coup d'envoi à une tradition de débat parlementaire
dans les institutions francophones.
Le tournoi était organisé conjointement par le groupe Débathon de
l'Université et la Société universitaire canadienne pour le débat
intercollégial. Ce style de débat parlementaire existe depuis plus de
100 ans dans les institutions anglophones, mais demeure peu pratiqué dans
les universités francophones. Membre du comité organisateur des Débathons et
directeur du Tournoi de débat parlementaire, l'étudiant en physique Dany
Plouffe indique en quoi les débats sont formateurs selon lui : «Ils
permettent de réfléchir sur les enjeux d'un sujet et de développer
l'ouverture d'esprit. L'activité est complémentaire à la formation
universitaire.»
Six étudiants de l'Université faisaient partie des équipes. Dans un débat
parlementaire, l'équipe du gouvernement propose à l'assemblée une résolution
contentieuse qui est combattue par l'équipe de l'opposition. Les débats
opposent deux équipes de deux personnes. La première équipe amène le sujet
et sa position tandis que la deuxième doit s'y opposer sans connaître le
sujet à l'avance. Quant à eux, les discours constituent de l'improvisation
durant trois minutes sur un sujet donné. Ils ont comme seul critère
l'originalité. L'énoncé de la finale des discours était le suivant : «Vous
faites face à un dilemme. Expliquez-nous quel est le dilemme et dites-nous
ce que vous faites.» Par ailleurs, l'énoncé de la finale des débats était
celui-ci : «Les soldats ne peuvent jamais être tenus responsables des actes
posés sous l'ordre d'un supérieur.» Étant donné le succès et les
collaborations entre les universités qu'a permis ce premier débat, l'équipe
du Débathon proposera d'accueillir l'an prochain le championnat de débat de
langue française. Des participants de l'Université McGill, des universités
d'Ottawa et de Sherbrooke ainsi que des collèges Brébeuf et Marionapolis ont
fait partie des débats. Les deux universités anglophones se sont retrouvées
en finale pour le débat et pour le discours.
|
|
Dany Plouffe est l'un des organisateurs des Débathons. Quatre
professeurs ont débattu le 5 février pour savoir si l'enseignement
ou la recherche est le rôle premier de l'Université.
Photo SSF : Roger Lafontaine |