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Liaison, 2 octobre  2003

Nouveautés livres

Critique invitée : Sylvie Bareil, bibliothécaire

Bon au point d'écourter mes nuits

Il y a longtemps que je n'avais pas été captivée par un livre au point d'écourter mes nuits de moitié. Par chance pour ma santé, ce roman n'a duré que deux nuits! La nostalgie de l'ange est le deuxième livre d'Alice Sebold, mais son premier roman. Dans son premier ouvrage, intitulé Lucky (1999), Alice Sebold faisait face à son propre viol survenu lorsqu'elle avait 18 ans. C'était en fait un mémoire dans lequel le lecteur pouvait suivre la quête de paix intérieure de l'auteure. Son roman traite également du viol, mais cette fois, de façon romanesque.

Dès la première ligne du roman, nous sommes plongés dans un récit qui pourrait facilement nous rebuter. Il est tentant de refermer le livre, sous prétexte que les journaux rapportent assez de tragédies sans, en plus, s'en faire une lecture de loisir. Mais, grâce à sa façon simple, sensible et parfois même humoristique de narrer cette histoire, l'auteure réussit à nous rendre cette lecture très agréable.

Le lendemain de sa mort, Susie Salmon, quatorze ans, nous raconte que le 6 décembre 1973, en revenant de l'école, elle est violée, tuée et coupée en morceaux par un voisin, monsieur Harvey. Pendant les jours qui suivent son meurtre, elle regarde la vie sur Terre qui continue : ses amis et amies de classe qui propagent toutes sortes de rumeurs sur sa disparition, sa famille qui garde espoir qu'elle soit retrouvée, son meurtrier qui tente d'effacer toute trace de son crime. Puis, au fil des pages, jour après jour, année après année, sont racontées par Susie les répercussions de sa mort sur les vies des gens qui la côtoyaient : le bouleversement de la dynamique familiale; la remise en question du couple formé par ses parents; la fuite de sa meilleure amie dans les bras de son ami; la solitude du garçon qui lui a donné son premier baiser; la recherche intérieure de l'adolescente Ruth Connors qu'elle a accidentellement frôlée en quittant la Terre.

Le sujet de ce roman porte davantage sur la vie de ceux qui restent que sur le viol ou le meurtre. De son point de vue céleste, Susie brosse un portrait de la condition humaine, de la vulnérabilité de l'être humain, de sa grandeur et de sa misère aussi, et ce, en observant les joies, les peines, les souffrances, les impuissances, les espoirs, les déceptions, les hésitations, les amours, les haines des personnages impliqués dans son histoire.

Susie décrit aussi sa vie au Paradis dont elle fait la découverte en même temps que nous. Le Paradis serait l'endroit où se concrétise tout ce que nous avions ardemment souhaité sur Terre. D'abord, de son ciel, Susie tente de faire voir des choses aux gens qu'elle voit vivre, puis elle réalise rapidement qu'il lui est tout à fait impossible d'agir sur ce qui se passe sur Terre. Elle aurait spécialement voulu faire découvrir son meurtrier qui, lui, continue librement de violer et de tuer des jeunes filles et des femmes.

Susie n'est ni triste, ni fâchée ou amère. Elle semble plutôt un amalgame de curiosité et d'espoir. Certainement, nous sentons qu'elle éprouve parfois un certain regret, mais moins pour elle-même que pour les siens qui demeurent dans la noirceur quant à la suite de sa vie à elle. Peut-être que c'est parce que Susie nous raconte toute cette histoire depuis le Paradis que nous y croyons. Peut-être aussi est-ce à cause de la sincérité candide de ses quatorze ans. Peut-être également parce qu'elle se préoccupe profondément de ces êtres humains qu'elle voit se débattre avec la vie.

Plusieurs images de ce récit s'inscrivent intensément dans notre esprit et s'oublient difficilement. Même si le ton général de l'auteure ne peut se qualifier de sentimental ou de dramatique, Alice Sebold réussit à exprimer des sentiments forts à travers des descriptions de faits quotidiens banals.

Il est intéressant de noter également la construction particulière de l'histoire. La narration allie continuellement le passé au présent. Les évènements arrivés avant la mort de Susie s'imbriquent habilement et incessamment aux faits observés au présent de façon à ce que nous puissions comprendre la vie et la dynamique des personnages "avant".

Simultanément, le récit sous-tend le fil conducteur qui pourrait s'avérer la lente progression de la famille dans l'acceptation de la mort de Susie. Une légère atmosphère de suspense règne aussi dans ce livre à cause de toutes ces vies qui nous sont révélées par bribes, suscitant ainsi notre curiosité de connaître la suite. La fin, surprenante, laisse planer plus de questions que de réponses quant à l'idée de l'auteure sur la vie après la vie…

Alice Sebold, La nostalgie de l'ange, Éd. Nil, 2003, 356 pages, traduit de l'américain par Edith Soonckindt.

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