|
Bénévole auprès des scouts depuis 11 ans
Par amour pour la nature
Robert Ouellet est agent de liaison à l'Université de Sherbrooke. Il y
a onze ans, sa fille joignait la troupe des Étincelles, l'un des quatre
groupes qui composaient à l'époque le mouvement des Guides, aujourd'hui
fusionné avec celui des Scouts. Grand amateur de plein air, Robert fut déçu
de constater qu'aucune activité de ce type n'était au programme. Personne
parmi les animateurs n'était apte à en donner, lui a-t-on répondu. Qu'à cela
ne tienne, il n'en fallait pas plus pour qu'il offre ses services, d'abord à
titre de formateur ponctuel puis, l'année suivante, comme animateur de la
troupe. Onze ans plus tard, Robert est toujours animateur chez les scouts et
il est toujours habité par la même passion, celle de faire découvrir la
nature aux jeunes de la région.
CHARLES VINCENT
C'est en 1976 que Robert a goûté pour la première fois au camping d'hiver
et au canot-camping. Depuis ce temps, il a multiplié les expéditions dans
divers endroits reculés du Québec, loin de la civilisation, en plein cœur de
la nature sauvage, celle qu'il affectionne tout particulièrement. Être dans
le bois, pour lui, c'est un véritable mode de vie. Alors que sa fille
n'avait que six mois, Robert l'emmena avec lui en expédition. «Frédérique a
grandi là-dedans, explique-t-il. Petite, à l'école, elle fut surprise de
constater que ses amis ne campaient pas dehors, comme elle, en plein hiver.»
Ses deux fils, Guillaume et Étienne, sont eux aussi «tombés dans la marmite»
lorsqu'ils étaient petits. «Je me souviens de Guillaume, lance Robert. Il
devait avoir huit ans. Il avait des graines d'oiseaux dans ses mains et il
était couvert de mésanges. Vous auriez dû voir ses yeux!»
«Mon père était un homme de bois, explique Robert Ouellet. Il m'a
transmis des connaissances sur la nature, les animaux, les plantes. Comme
lui, je m'efforce de léguer ce savoir à mes enfants, mais aussi aux jeunes
de ma troupe.» Et pour ce faire, Robert ne compte pas les heures. Avec ses
quatre collègues animateurs, dont sa fille qui après 11 ans est devenue elle
aussi animatrice, il planifie et anime la réunion hebdomadaire de deux
heures à laquelle sont conviés les jeunes de sa troupe. Lors de cette
réunion, les jeunes de 12 à 14 ans, baptisés les Couguars de Rock Forest,
apprennent les rudiments du plein air, discutent et décident des projets
qu'ils veulent mener. Un weekend par mois, ils partent à l'extérieur et
quatre fois par an, ils réalisent une expédition ou une construction de plus
grande envergure.
Tipi, quin-zee et maison longue
À ce jour, les Couguars ont notamment construit, en pleine forêt, un tipi
dans lequel ils ont séjourné quelques nuits, en hiver. Ils ont également
façonné des quin-zees, l'équivalent «austral» des igloos. «On ne peut pas
construire d'igloo dans nos régions, explique Robert Ouellet. La neige ne le
permet pas.» C'est pour cette raison que les Amérindiens du sud du Québec
construisaient des quin-zees. La technique est simple. On crée un monticule
de neige qu'on tape en marchant dessus, raquettes aux pieds. On laisse
ensuite reposer la neige quelques heures pour améliorer la compaction, puis
on creuse le centre de manière à dégager un espace pour dormir. À la toute
fin, on perce un petit trou au plafond pour faire de l'aération.
Cette année, les Couguars ont construit une maison longue au carrefour de
deux petits ruisseaux, dans un boisé de la région. Il leur aura fallu six
jours pour terminer la construction de cette habitation traditionnelle
iroquoise. À l'époque, ces maisons pouvaient abriter jusqu'à 24 familles.
Plus modeste, la leur n'en a pas moins 4,57 m de large sur 7,62 de long et
4,57 de haut. Assez pour accueillir la quinzaine de jeunes de la troupe, et
même plus. Ceux-ci ont tout fait eux-mêmes, sous la supervision et avec
l'aide (quand même!) des animateurs, de même que de quelques parents qui
sont venus donner un coup de main le dernier jour des travaux. Ils ont
transporté les planches, érigé la charpente et les murs, aménagé l'intérieur
et procédé à l'isolation. Chacun d'entre eux devait fabriquer son propre lit
suspendu avec de la corde à brêler, selon la méthode traditionnelle
amérindienne.
Les travaux se sont déroulés entre novembre et janvier, à des
températures pouvant aller jusqu'à -25° C. Mais
ce n'est certainement pas les rigueurs de l'hiver qui auraient pu freiner
l'enthousiasme des jeunes scouts. Après tout, le but n'était-il pas de
dormir dans leur maison par grand froid? C'est ce qu'ils ont fait récemment.
Ils y ont dormi deux nuits, avec la satisfaction du devoir accompli. «En
plus de construire la maison, les jeunes devaient planifier leur expédition
de camping d'hiver, indique Robert Ouellet. Ils ont dû apprendre à se vêtir,
à participer à l'intendance ainsi qu'à planifier et préparer leur repas. Et
ce n'est pas parce qu'on est dans le bois qu'on ne peut pas bien manger.
Certains se sont fait des crevettes à l'ail sur lit de riz, d'autres du
poulet en sauce.»
Apprendre à gérer des projets
«Toutes nos activités reposent sur le principe du VCPREF, explique Robert
Ouellet. Elles sont Voulues, Choisies, Planifiées, Réalisées, Évaluées et
Fêtées en groupe. C'est en quelque sorte une initiation à la gestion de
projet. Et ça marche très bien!» Les premières décisions se prennent au
niveau de la patrouille, soit un groupe formé d'environ six jeunes. Chaque
patrouille propose ensuite ses projets à la troupe, autrement dit l'unité
qui regroupe de trois à quatre patrouilles. Tous les projets sont alors
soumis au vote. Afin d'éviter que les jeunes se laissent influencer par les
têtes fortes, le vote est secret : ils se placent en cercle, dos au reste du
groupe, les mains croisées derrière eux, indiquant leur préférence par un
signe de la main.
Pour les animateurs scouts, il importe d'inculquer aux jeunes
l'autonomie, mais aussi la force du groupe, deux valeurs auxquelles Robert
Ouellet croit fermement. Deux valeurs qui trouvent un écho particulier dans
la réalisation de projets tels la maison longue ou encore le tipi. «Chacun
des jeunes doit s'organiser individuellement et faire sa juste part des
travaux collectifs, souligne Robert. Par exemple, sans le concours de tous,
on ne saurait ériger la charpente d'une maison longue. Et, pour leur faire
comprendre ça, il n'y a rien de mieux que la vie en pleine nature. Celle-là
même qui peut être impitoyable si on est mal préparé.» Mais ce n'est pas
demain la veille que les scouts de Robert Ouellet seront mal préparés aux
vicissitudes de la vie en forêt. Parole de scout!
Retour à la une
|