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Les artisans d'un campus vert
CHARLES VINCENT
Pour plusieurs d'entre nous, l'arrivée du printemps est synonyme de
jardinage. C'est le temps de l'année où nous nous ruons dans les cabanons,
à la recherche de nos arrosoirs, de nos pelles et de nos râteaux, l'équipement
de base du jardinier amateur répondant à l'appel de la terre après
plusieurs mois encabané dans le confort de son foyer. Pour l'équipe d'entretien
paysager de l'Université de Sherbrooke, l'arrivée de la belle saison
marque le départ d'une routine réglée au quart de tour. Entre la mi-avril
et la mi-octobre, la quinzaine d'employés sillonne sans arrêt les quelque
76 acres de terrain aménagé, soit à peu près 500 fois la superficie
d'un terrain de ville moyen.
Ce n'est pas sans raison que l'on compare souvent le campus universitaire
à une cité. Les propriétés de l'Université de Sherbrooke s'étendent
sur 750 acres, du boulevard de l'Université au Collège Mariann-Hill,
de la fin de l'autoroute 410 au chemin Dunant. Plusieurs l'ignorent,
mais tout le mont Bellevue appartient à l'Université, ce qui inclut les
sentiers pédestres empruntés chaque année par de nombreux Sherbrookois,
à l'exception cependant du centre de ski et du stand de tir à l'arc qui
sont la propriété de la municipalité. Une véritable petite ville, donc,
avec une trentaine de bâtiments, des aires gazonnées, des routes, des
trottoirs, des stationnements, des aires de jeux…
Lorsque les premiers jours du printemps arrivent, l'équipe d'entretien
paysager s'active aux quatre coins du campus. Il faut enlever les clôtures
à neige, nettoyer les 18 km2 de rues et de stationnements ainsi que
les 12 km de trottoirs. Ensuite viennent le ratissage des pelouses, la
préparation des plate-bandes et la taille des quelque 2000 arbres et
arbustes que compte la partie aménagée du Campus principal. Un travail
qui, chez vous, ne prendrait que quelques heures, mais qui, à l'Université
de Sherbrooke, occupe quatre hommes à temps plein pendant trois semaines.
Après, bien sûr, il faut tondre les 320 116 mètres carrés de gazon,
un "ballet" qui ne cessera que lorsque les températures
automnales arrêteront la pousse du gazon.
Une équipe de passionnés
Il faut une semaine complète à trois hommes, au volant de leur
tracteur, pour tondre les 79 acres de gazon du Campus principal. Une
routine que les préposés à la tonte exécutent une vingtaine de fois par
année. Sylvain Lagassé est l'un d'eux. Depuis cinq ans, il conduit son
tracteur d'une faculté à l'autre, beau temps mauvais temps. "On
arrête seulement lorsqu'il y a des orages électriques", indique-t-il
le visage tout sourire. Visiblement, il aime travailler au grand air. Quand
on lui demande si, malgré tout, il tond lui-même son gazon à la maison,
il éclate de rire et répond que l'affaire est vite exécutée : "Une
demi-heure à la petite tondeuse", s'esclaffe-t-il. De la petite
bière, quoi!
Michel Bédard est quant à lui préposé à la signalisation, en plus d'être
en charge de la fertilisation des pelouses. Lorsqu'il ne s'affaire pas à
poser, déplacer ou réparer l'un des quelque 500 panneaux de
signalisation installés çà et là sur les campus, il sillonne le terrain
aux commandes de son épandeuse. L'an dernier, il a épandu 800 kilos d'engrais.
C'était avant que l'Université fasse son virage vert. En effet, d'ici un
an, elle n'utilisera plus que des engrais naturels : du fumier de poule et
du maïs concassé, notamment. Il faut deux semaines à Michel pour faire le
tour du campus. Une "petite virée" qu'il exécute à quatre
reprises entre les mois d'avril et octobre.
Le jardinage, c'est l'affaire de Maurice Quirion. "Maurice, c'est
celui qui a le pouce vert, raconte Luc Thompson, le contremaître de l'équipe.
Il s'occupe principalement du désherbage, de la plantation et de la taille
des arbres. Il y a cinq ans, on lui a demandé de faire une plate-bande en l'absence
de la personne responsable. On a apprécié ce qu'il a fait et on lui a
immédiatement donné le contrat". Sa routine l'amène à remplir deux
buckets (pelles de tracteur) de mauvaises herbes, semaine après semaine.
Dans ses aménagements, il tient à intégrer des plantes indigènes prises
dans la montagne, des vinaigriers, des épinettes et des fougères, par
exemple.
Il faut de l'organisation pour coordonner le travail de ces hommes,
encore plus quand il s'agit de le conjuguer aux volontés de Mère Nature,
reconnaît Luc Thompson. "Il faut que les hommes soient polyvalents,
précise-t-il. Cette année, par exemple, il a fallu attendre plus longtemps
qu'à l'habitude pour que le terrain s'assèche. Malgré tout, il n'était
pas question d'accumuler du retard." La marotte du contremaître, c'est
la plantation d'arbres. Il en plante de 20 à 30 par année, des arbres qu'il
va chercher dans le mont Bellevue. Ces dernières années, il en a
transplanté environ 500 dans l'optique d'apporter au campus un peu d'ombre
durant les canicules.
Au cours des prochains mois, ces hommes et leurs collègues préposés au
terrain répéteront leur routine, jour après jour, semaine après semaine,
travaillant d'arrache-pied pour que l'Université de Sherbrooke maintienne
sa réputation d'université nature. Grâce à leur travail, le campus
continuera d'être un endroit où il fait bon vivre, en plein cœur de la
verdure, à flanc de montagne. Après tout, ce n'est pas pour rien que la
couleur de l'Université de Sherbrooke est le vert.
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