Liaison, le journal de l'Université de Sherbrooke, 31 octobre 2002

 

Luc Mathieu, premier docteur en administration DBA au Canada

Sylvie Couture

"Une belle aventure!" Luc Mathieu parle du programme de doctorat en administration de type DBA comme d’une expérience de vie intense et enrichissante. Le samedi 26 octobre, à l’occasion de la cérémonie de la collation des grades, il est devenu le premier docteur en administration DBA au Canada. Ce n’est cependant pas le fait d’être le premier à recevoir ce grade qui retient son attention. "Pour moi, c’est le couronnement de près de quatre années de travail et d’efforts continus. C’est tout simplement une journée de fête. Je peux vous assurer que ce diplôme sera encadré et aura une place de choix dans mon bureau."

Luc Mathieu fait partie de la première cohorte de ce programme unique au Canada, offert conjointement par l’Université de Sherbrooke et l’Université du Québec à Trois-Rivières depuis 1998. Ailleurs au Canada, la formation au doctorat en administration est rattachée au grade Ph.D. et privilégie une approche axée sur la recherche. Le grade universitaire DBA, pour Doctorate in Business Administration, est pour sa part reconnu aux États-Unis depuis 25 ans, soit depuis que la réputée Harvard Business School a adopté un mode de formation axée davantage sur la pratique et liée étroitement au milieu des entreprises et organisations.

Ici, le programme de doctorat en administration de type DBA vise à assurer une formation fondamentale et appliquée en sciences de l’administration. Il accorde un intérêt particulier au phénomène de la mondialisation des marchés et favorise l’innovation dans les modes d’apprentissage pour garantir aux étudiants une adaptation constante au monde des affaires. Cette préoccupation se traduit dans l’orientation multidisciplinaire de la formation, l’utilisation des nouvelles technologies de communication dans les activités de formation et le travail en entreprises afin d’encourager un véritable transfert des connaissances.

"Lâche pas, papa!"

Luc Mathieu cumule aujourd’hui les fonctions de professeur adjoint au Département des sciences infirmières de la Faculté de médecine, de directeur du développement d’expertises au Centre d’expertises en gérontologie de l’Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et de chercheur au Centre de recherche sur le vieillissement. Il a obtenu un diplôme en techniques infirmières du Collège de Sherbrooke en 1978, un baccalauréat en sciences infirmières de l’Université de Sherbrooke en 1985 et une maîtrise en administration des services de santé de l’Université de Montréal en 1988. Avant de se lancer corps et âme dans son programme de doctorat, il occupait le poste d’adjoint à la direction des soins infirmiers à l’Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke. La transition n’a pas été si facile. "Pour recommencer à étudier, je devais d’abord réveiller les neurones en latence depuis plus de dix ans, lance-t-il en riant. Mais le plus déstabilisant est d’entrer dans une filière d’activités de recherche après avoir agi comme gestionnaire depuis de nombreuses années et, souvent, avoir été leader dans son secteur d’activités."

Pour lui, il y a plusieurs conditions essentielles à la réussite d’un programme aussi intense. La première demeure le soutien de son entourage et de sa famille. "Je vais sûrement remettre la moitié de mon diplôme à ma femme!" confie-t-il en se rappelant avec tendresse des petits gestes qui font souvent la différence, comme des courriels disant "Lâche pas, papa!" que ses filles lui envoyaient lorsqu’il devait travailler le soir. La deuxième condition réside dans le choix du directeur de recherche. "Martin Buteau a été pour moi un directeur de "classe mondiale", insiste-t-il, pour rappeler un leitmotiv qui circule au département. Et enfin, il ajoute une condition primordiale relative au sujet de la thèse. "On doit surtout y croire fermement."

Système d’information en soins infirmiers de longue durée

Luc Mathieu croit fermement au sujet de sa thèse, si bien que le système d’information qui en découle est déjà en application à l’Institut de gériatrie de Sherbrooke. Intitulée Gestion des connaissances cliniques : développement, implantation et évaluation d’un système d’information en soins infirmiers de longue durée, sa thèse s’inscrit parfaitement dans les objectifs du programme qui vise l’intégration pratique de solutions à des problématiques organisationnelles. Elle répond à un besoin d’accès à un système d’information clinique pour le personnel infirmier.

Basé sur l’utilisation de classifications infirmières normalisées, ce système d’information vient appuyer la pratique clinique des infirmières et infirmiers en soins de longue durée, favoriser l’élaboration et le suivi de plans de soins pour les patients et permettre le stockage de données pour des fins de gestion clinique, d’évaluation et de recherche. "Ce système pourrait facilement être déployé dans d’autres milieux hospitaliers de longue ou de courte durée", soutient Luc Mathieu qui souligne également l’importance de poursuivre la recherche dans ce secteur pour faciliter le travail des différents intervenants en milieux hospitaliers. Stimulé par l’obtention de son doctorat, il dit rêver de la création d’un centre de recherche, peut-être même d’études post-doctorales; mais d’un même souffle, il implore : "S’il vous plaît, déprogrammez-moi!"

Photo SSE : Roger Lafontaine