La mutagénèse dirigée : une découverte de première importance

Lors de la collation des grades qui se déroulera en matinée samedi, l'Université décernera un doctorat d'honneur en médecine à Michael Smith, professeur-chercheur à l'Université de la Colombie-Britannique et père de la mutagénèse dirigée.

La découverte de cette technique par Michael Smith, en 1978, a eu des répercussions extrêmement importantes, que ce soit en recherche fondamentale, en recherche clinique ou en recherche appliquée. Elle constitue le plus haut fait d'arme d'une carrière scientifique exemplaire à plus d'un point de vue et a permis au chercheur, en 1993, de mettre la main sur le prix le plus important que puisse remporter un chimiste : le prix Nobel de chimie.

La légende veut que l'idée de la mutagénèse dirigée soit venue à l'esprit de Michael Smith lors d'une conversation à bâtons rompus avec des collègues à la salle de repos du personnel. Comme c'est l'acide désoxyribonucléique (ADN) qui permet aux cellules de produire des protéines, le chercheur a pensé que les cellules produiraient d'autres protéines si leur ADN se trouvait modifié. Il a donc trouvé le moyen de modifier le code d'une molécule d'ADN, en utilisant des oligonucléotides synthétiques pour modifier certains gènes qu'il avait isolés. Il a par la suite replacé les gènes modifiés dans les cellules pour vérifier quel effet cette modification avait eu sur les propriétés de la protéine, réalisant ainsi en laboratoire, de manière très précise, le type de mutations qui se produisent parfois spontanément dans la nature et qui peuvent conduire, par exemple, à l'apparition de cellules cancéreuses.

En plus de permettre de mieux comprendre le fonctionnement des systèmes biologiques, la découverte de Michael Smith a eu des répercussions importantes sur le monde scientifique. Ses travaux ont par exemple mené à la création d'anticorps utilisés dans le traitement du cancer et à la mise au point de produits sanguins synthétiques. Ils inspirent aussi nombre de scientifiques faisant de la recherche sur le sida.

Humour et générosité

Michael Smith est né le 16 avril 1932 à Blackpool, en Grande-Bretagne. Issu d'une famille modeste, il a bénéficié de bourses d'études pour faire ses études secondaires à la Arnold School. De cette époque, il garde deux principaux souvenirs : la mauvaise nourriture et les grandes qualités de son professeur de chimie, Sidney Law, qui a sans doute compté pour beaucoup dans le choix de carrière du Nobel.

Après ses études secondaires, il a étudié à l'Université de Manchester où il a obtenu son baccalauréat et son doctorat. Micael Smith a fait un stage postdoctoral au Conseil de la recherche de la Colombie-Britannique, puis il a été associé de recherche à l'Université du Wisconsin à Madison avant de diriger le laboratoire de Vancouver du Bureau canadien de recherche sur les pêcheries.

En 1966, Michael Smith s'est joint au Département de biochimie et biologie moléculaire de l'Université de la Colombie-Britannique (UBC), où il est resté jusqu'en 1971. Il a par la suite travaillé pendant deux ans aux MRC Laboratories de Cambridge, puis est revenu au Canada prendre la direction du Laboratoire de biotechnologie.

En plus du prix Nobel, Michael Smith a reçu de nombreuses récompenses. Il est entre autres membre de la Société royale du Canada et de la Société royale de Londres.

Michael Smith a décidé de faire don des 500 000 $ accompagnant le prix Nobel. Il a séparé l'argent entre trois bonnes causes : la recherche sur la schizophrénie, l'enseignement dans les régions éloignées de Colombie-Britannique et l'accès des jeunes filles à la carrière scientifique.

Bruno Levesque