Aller au contenu

Mémoire - Alexandre McCABE

L’amour et la mesure dans l’œuvre d’Albert Camus 

Alexandre McCABE

À sa mort, accidentelle et tragique, Albert Camus, qui n’a alors que 47 ans, laisse derrière lui une œuvre inachevée. Trois ans après la réception du prix Nobel de littérature de 1957, l’écrivain croyait que son œuvre était encore à faire. À preuve, quelques mois avant sa mort, Camus avait amorcé ce qu’il entrevoyait comme le troisième cycle de son œuvre. Après l’avoir fait pour l’absurde et la révolte, Camus comptait consacrer un essai, une pièce de théâtre et un roman à la thématique de l’amour (les cycles étant ainsi constitués). Le premier homme, manuscrit publié par sa fille Catherine en 1994, soit 34 ans après sa mort, est malheureusement la seule trace concrète de ce qu’aurait pu devenir ce troisième cycle. Ce silence, trop précoce, laisse de nombreuses questions sur le cours nouveau qu’auraient pris les écrits d’Albert Camus. À défaut d’en connaître un jour la substance, il est possible d’en deviner les préoccupations et les intuitions contenues entres autres dans les notes laissées par l’écrivain et dans le développement même de l’œuvre camusienne. Au moment de bâtir son troisième cycle, Camus s’était déjà attaché à l’amour. Dès sa jeunesse, l’écrivain, fidèle à quelques intuitions fondatrices de sa pensée, avait déjà reconnu en l’amour une racine essentielle. Nous avons tenté, à travers ce mémoire portant sur l’amour dans l’œuvre d’Albert Camus, de réfléchir à la place qu’a occupée cette thématique dans ses écrits. Reprenant trois définitions tirées du lexique grec, Éros, Philia et Agapè, nous avons cherché dans l’œuvre de Camus les multiples manifestations de l’amour. La lecture qui a découlé de cette « grille » d’analyse, souple, mais selon nous pertinente, donne un aperçu éclairant des questionnements qu’a eus l’écrivain en regard de l’amour tout au long de sa vie et plus particulièrement dans les dernières années de celle-ci (le récit du roman Le premier homme, bien qu’il soit inachevé, le confirme). L’amour maternel, l’amour du monde, l’amour des femmes, la solidarité et la fraternité sont autant de visages que Camus a donnés à l’amour dans ses écrits. Nous nous sommes employés dans ce mémoire à distinguer ces différentes formes d’amour et à les replacer dans leur contexte particulier.