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Un des textes gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2020

Une technologie canadienne dans l’espace utilisée pour protéger le Nord

Gabriela Siles
Gabriela Siles
Photo : Fournie

Les activités humaines et les changements climatiques mettent en danger les milieux humides du Nord canadien qui sont les habitats de nombreuses espèces animales. Conséquemment, les services que ces milieux offrent - comme la régulation naturelle de l’eau et le stockage du carbone atmosphérique - pourraient s’épuiser, et plusieurs animaux comme le bison et de nombreux oiseaux migratoires seront davantage menacés. Des satellites pourraient être utiles pour aider les décideurs à agir plus efficacement et mitiger ces problèmes, mais ils produisent d’énormes quantités de données qui sont difficilement compréhensibles. Heureusement, un article publié à l’automne dernier dans Remote Sensing of Environment propose une solution. En effet, les chercheurs ont réussi à développer une méthodologie basée sur la superposition d’informations extraites d’images satellitaires pour surveiller la variation de l’eau dans les terres humides nordiques.

À la sauvegarde de l’environnement en utilisant les satellites

La survie de plusieurs milieux humides du Nord canadien dépend des inondations produites par les embâcles de glace et les crues printanières et automnales. Par contre, deux facteurs peuvent modifier la fréquence de ces inondations et donc la disponibilité de l’eau pour ces écosystèmes. D’un côté, les changements climatiques peuvent provoquer une augmentation de la température, ce qui peut affecter la formation des embâcles de glaces et faire augmenter l’évaporation de l’eau.

Système de milieux humides du Nord canadien
Système de milieux humides du Nord canadien
Photo : Gabriela Siles

D’un autre côté, la modification du débit des rivières avec des barrages hydroélectriques ou la production pétrolière peut diminuer la superficie de ces habitats en changeant les inondations naturelles qui sont nécessaires à la survie de ces écosystèmes. Il est donc pertinent d’utiliser des images satellitaires en les combinant pour suivre la variation de la quantité d’eau et de la superficie de ces systèmes. Ces informations permettront aux décideurs d’agir pour avoir le moins d’impact possible sur le cycle naturel de l’eau.

Comment ça marche?

La méthodologie proposée utilise plusieurs images provenant d’un capteur à micro-ondes canadien pour obtenir des informations en profitant du fait que ces ondes soient sensibles à la présence de végétation inondée. Nous déterminons les variations dans l’étendue des milieux aquatiques en nous basant sur deux éléments qui sont comparés entre les images. Ces éléments sont l’amplitude (la mesure de la force du signal qui retourne au satellite) et la cohérence (la mesure de la dégradation de l’image). Ces mesures permettent de départager les zones de végétation inondée (où leur valeur est plus forte) et les zones d’eau libres de végétation (où leur valeur est plus faible). Cette nouvelle méthode à deux variables prend en compte les différents types de végétation et permet donc de créer des cartes d’inondation plus précises et plus complètes. La différence entre les deux images est également utilisée pour déterminer la variation du niveau d’eau et la direction l’écoulement de l’eau. On peut donc déterminer, au final, si l’eau des milieux aquatiques se vide ou se régénère.

Quels sont les résultats?

En utilisant cette méthodologie, les chercheurs ont réussi à faire un suivi détaillé de la dynamique de l’eau dans l’un des plus grands deltas d’eau douce du monde. Les milieux aquatiques qui ont déjà été observés avec cette technique ont tous démontré des signes d’assèchement. La perte de ces milieux et des services qu’ils offrent serait une réelle catastrophe. Heureusement, grâce à la technique développée, les chercheurs pourront sonner l’alarme et guider les décisions environnementales. Mais ce n’est pas tout. En collaborant avec un réseau international de spécialistes, l’équipe de chercheurs travaille sur le développement d’un nouveau satellite révolutionnaire qui, utilisé conjointement avec cette méthode, va permettre de protéger les ressources d’eau du Canada et du reste du monde.

À propos de Gabriela Siles
Gabriela Siles est une professionnelle de recherche au GRAUS, le Groupe de recherche sur l'eau de l'Université de Sherbrooke. Elle s’intéresse principalement à la géomatique appliquée à la gestion intégrée de la ressource en eau et des risques naturels. Ses motivations pour la recherche sont bien définies : « La transmission des connaissances et habilités m'interpelle depuis un moment déjà. J'ai eu la chance et le plaisir d'enseigner dans différents domaines au long de mes études. La diversité des projets et les opportunités de formation multidisciplinaires sont les facteurs principaux qui me motivent à poursuivre mes recherches au sein de mon groupe.»

À propos du Concours
L’Université de Sherbrooke tient annuellement un concours de vulgarisation scientifique dont les objectifs sont de stimuler des vocations en vulgarisation scientifique et d’augmenter le rayonnement des travaux de recherche qui s’effectuent à l’Université, qu’ils soient de nature fondamentale ou appliquée.


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