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Nouvelle parution

Rencontres juridiques Montpellier-Sherbrooke – Les sentiments et le droit

Vincente Fortier et Sébastien Lebel-Grenier (dir.), Rencontres juridiques Montpellier-Sherbrooke (juin 2011) – Les sentiments et le droit, Sherbrooke, Éditions Revue de droit de l'UdeS, 2012, 299 p.
Vincente Fortier et Sébastien Lebel-Grenier (dir.), Rencontres juridiques Montpellier-Sherbrooke (juin 2011) – Les sentiments et le droit, Sherbrooke, Éditions Revue de droit de l'UdeS, 2012, 299 p.

La théorie classique du droit repose sur une conception de l'homme comme un être désubstantialisé et désensibilisé, afin de mieux l'enserrer dans des statuts juridiques contraignants. L'individu ne vit pas ou fort peu; sa condition humaine est seulement d'exister dans certains rapports juridiques limités. Qu'il soit bon ou méchant, l'individu que le droit a en vue doit avant tout être contenu dans ses passions, réfréné pour son propre bien et pour celui de la société.

Cependant, cette posture épistémologique traditionnelle est aujourd'hui bousculée par un désir d'individuation, d'une reconnaissance de l'être dans sa singularité, se manifestant par une demande de prise en compte de ses sentiments par le droit. La satisfaction de celle-ci emporterait une nouvelle vocation pour le droit : concourir à l'épanouissement de la personne. Ce mouvement véhicule une appréhension de la personne humaine définie non plus seulement comme un être doué de raison mais également capable d'émotions. En d'autres termes, il s'agit de restituer au sujet de droit une profondeur dont le droit l'aurait privé.

On peut voir dans cette valorisation contemporaine de l'épanouissement personnel un déclin de la capacité des valeurs et des institutions collectives à mobiliser l'adhésion des individus et à participer indirectement à la construction de la personnalité. La «personnalisation» à laquelle on assiste aujourd'hui peut donc s'interpréter comme le produit d'un rejet de l'homogénéité impliquée par la généralité des normes et des modèles sociaux, rejet qui prend par réaction la forme d'une demande insatiable d'originalité, de singularité, et donc d'intégration dans le droit des sentiments de chacun.

Partant de la définition proposée par le Vocabulaire juridique de Capitant, et selon laquelle «le sentiment est une disposition psychologique relevant de l'affectivité; un mouvement du cœur (amour, jalousie, ensemble des ressentiments et dissentiments)», le présent ouvrage interroge, à travers une pluralité de perspectives, l'articulation du droit et des sentiments.