Aller au contenu

Réforme du Code de procédure civile

Vers une justice plus simple, plus rapide, plus économique et plus humaine

Jean-Francois Roberge
Jean-Francois Roberge

La justice évolue. Un jalon sera bientôt posé avec l'institution d'un nouveau Code de procédure civile. Relèvera-t-il le défi de l'accès à la justice? «Nous faisons un pas important dans cette direction», considère Jean-François Roberge, professeur à la Faculté de droit de l'Université de Sherbrooke et directeur des programmes de prévention et règlement des différends. Le professeur Roberge a déposé un mémoire à l'Assemblée nationale et sera entendu en commission parlementaire le 19 janvier. Selon lui, le nouveau Code de procédure civile favorise une justice plus simple, plus rapide et économique et plus humaine. Nous l'avons rencontré, question de savoir en quoi le nouveau Code de procédure civile réalisera ce tour de force.

USherbrooke/nouvelles : Professeur Roberge, pourriez-vous d'abord exposer ce qu'est le Code de procédure civile du Québec?

Jean-François Roberge : Le Code de procédure civile comprend l'ensemble des règles à suivre lorsqu'une personne fait appel au système de justice pour régler un conflit ou une situation qui n'est pas de nature criminelle ou pénale. Ces règles prévoient, entre autres, les différentes étapes à respecter, les pouvoirs des juges et les différents moyens pouvant être utilisés pour régler un conflit.

USherbrooke/nouvelles : En quoi le nouveau Code de procédure civile peut-il rendre la justice plus accessible au chapitre de la simplicité?

Jean-François Roberge : Mentionnons d'abord un fait reconnu : nous assistons à un phénomène de «décrochage judiciaire» causé notamment par la complexité du système de justice.

Parlons maintenant des avancées de l'avant-projet de loi pour réduire la complexité du système judiciaire. Premièrement, le nouveau Code de procédure civile a subi une cure minceur avec une version écourtée du tiers par rapport au Code précédent. Deuxièmement, il adopte une structure épurée et plus logique. Cela facilite sa compréhension, notamment pour le citoyen qui choisit de se représenter seul. Troisièmement, il simplifie le langage de la procédure civile.

USherbrooke/nouvelles : En quoi le nouveau Code de procédure civile rendra-t-il la procédure judiciaire plus rapide et économique?

Jean-François Roberge : Tout d'abord, il introduit l'obligation de la «tentative de règlement à l'amiable» qui force les parties, de même que leurs avocats, à se parler avant d'entamer les procédures judiciaires.

Ensuite, il donne le pouvoir au tribunal de vérifier rapidement si les actes de procédure et les moyens de preuve (interrogatoires, expertises, etc.) que les parties veulent utiliser sont proportionnés par rapport à la nature et au montant du litige.

Comme dernier exemple, soulignons que le nouveau Code de procédure civile encourage l'usage de tout moyen technologique approprié permettant d'économiser des coûts en temps et déplacement.

USherbrooke/nouvelles : Et en quoi le nouveau Code de procédure civile propose-t-il une justice plus humaine?

Jean-François Roberge : Il encourage les parties à s'impliquer pour donner un visage humain à la justice par la voie des modes de prévention et de règlement des différends (PRD), tels que la négociation, la médiation et la conférence de règlement à l'amiable. La justice devient ainsi participative et permet au citoyen de jouer un rôle de premier plan dans le processus pour imaginer la solution qui lui convient.

USherbrooke/nouvelles : Depuis quand le système de justice québécois intègre-t-il les modes de PRD?

Jean-François Roberge : Depuis environ 20 ans. La médiation civile et commerciale s'est développée au Québec au début des années 90.

Du côté de la médiation judiciaire, un projet-pilote a été lancé à la Cour d'appel du Québec en 1997 sous l'impulsion de la juge Louise Otis. Ce projet, dans lequel le juge agit comme médiateur, a connu un si grand succès que le législateur québécois a intégré la médiation judiciaire lors de la réforme du Code de procédure civile du Québec en 2003. On lui a donné comme appellation la «conférence de règlement à l'amiable». Depuis, la médiation judiciaire est pratiquée par tous les tribunaux québécois.

En fait, les modes de PRD s'intègrent si bien à notre système de justice que le Barreau du Québec, la Chambre des notaires et la magistrature québécoise en font la promotion.

USherbrooke/nouvelles : Cette évolution est-elle planétaire?

Jean-François Roberge : Effectivement! Ce mouvement de transformation de la régulation sociale et d'amélioration de l'accès à la justice par les modes de PRD n'est pas propre au Québec ni au contexte nord-américain. La législation européenne favorise de plus en plus les modes de PRD pour évoluer vers un meilleur accès à la justice.

USherbrooke/nouvelles : Pourquoi l'Université de Sherbrooke est-elle considérée comme chef de file dans ce domaine à l'échelle du monde francophone?

Jean-François Roberge : Parce que nous avons le programme universitaire le plus développé par lequel 500 spécialistes de haut niveau ont été formés en 12 ans. Ces 500 «PRDistes» sont des juristes ou des spécialistes qui évoluent dans une multitude de secteurs (relations de travail, droit, psychologie, génie, commerce, industrie de la construction, sphère sociale, etc.). Ils agissent comme moteurs de développement des modes de PRD dans leur milieu.

La Faculté de droit offre aussi des formations sur mesure aux organisations juridiques et non juridiques. Elle a formé les juges du Québec à la médiation judiciaire en collaboration avec l'Institut national de la magistrature, et plusieurs magistrats des autres provinces canadiennes, de la France, de la Belgique et du Brésil. On parle ici de plus de 400 juges.

En médiation civile et commerciale, la Faculté a déployé ses formations au Sénégal, au Bénin et au Burkina Faso. Bref, les demandes de formation affluent des quatre coins de la planète!


Informations complémentaires