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L'un des gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2019

Hydratation et ultramarathon : un poids, deux mesures

Thomas Deshayes, étudiant au doctorat en sciences de l'activité physique.
Thomas Deshayes, étudiant au doctorat en sciences de l'activité physique.

Photo : fournie

L’or et le fer ont le même poids. Pourtant, derrière ce même poids se cachent des valeurs bien différentes. Dans ce cas, estimer la valeur de l’objet par son poids peut s’avérer trompeur. Comme beaucoup d’athlètes, Camille, ultramarathonienne, utilise son poids pour estimer son état d’hydratation lors de ses courses : quand il diminue, elle se dit qu’elle perd de l’eau. L’American College of Sport Medicine recommande d’ailleurs de ne pas perdre plus de 2 % de son poids pour éviter que la déshydratation nuise à la performance sportive. Mais la perte de poids est-elle nécessairement associée à la déshydratation lors des épreuves de longue durée ? Une équipe de chercheurs, dont fait partie le professeur Éric Goulet de l’Université de Sherbrooke, a prouvé que non!

Estimer la déshydratation à partir du poids, une méthode pas toujours valide

Dans un contexte stable d’entraînement et de nutrition, le poids de Camille varie peu, si bien que tout changement entre le début et la fin d’un exercice peut être associé à une variation d’eau. Le calcul est simple : si elle perd 1 kg, elle perd 1 litre d’eau et elle doit boire pour compenser cette perte. Cependant, les chercheurs démontrent que sur la ligne d’arrivée Camille pouvait avoir perdu 3 % de son poids sans même être déshydratée. En effet, lors des épreuves de longue durée, d’autres facteurs peuvent expliquer la perte de poids et le calcul n’est plus si simple! Alors, qu'est-ce qui se cache derrière la perte de poids de Camille, de l’or ou du fer ?

Des mécanismes à la rescousse de l’hydratation

Afin de parcourir les 161 km d’un ultramarathon, Camille a besoin de l’énergie qui provient des glucides et des lipides stockés dans les réserves de son corps. Ce dernier brûle donc ses réserves pour produire de l’énergie. Les réactions chimiques qui brûlent les glucides et les lipides génèrent également de l’eau. Non seulement ce mécanisme induit à lui seul une perte de poids de près de 1 kg sans perte d’eau, mais il en produit l’équivalent de 3 tasses!  De même, dans le muscle les glucides se regroupent et se lient pour être stockés et deviennent ainsi du glycogène. Lors de son stockage dans le muscle, des molécules d’eau sont emprisonnées avec le glycogène, tout comme une éponge retient l’eau. Au fur et à mesure que le glycogène est utilisé pendant l’effort, l’eau contenue dans cette éponge se libère et remplace progressivement celle perdue par la sueur et la respiration. Ces mécanismes permettent donc le maintien de l’hydratation et réduisent le besoin de boire de l’eau, malgré la perte de poids générée par l’usage des réserves d’énergie.

Des recommandations risquées dans un contexte d’ultra-endurance

Ainsi, les recommandations actuelles en matière d’hydratation ne sont pas adaptées aux efforts de longue durée et peuvent même s’avérer dangereuses. Additionné à la préoccupation excessive à l’égard de l’hydratation chez les athlètes, cela peut conduire à la surhydratation, elle-même très dangereuse.

À propos de Thomas Deshayes

Thomas est étudiant au doctorat en sciences de l’activité physique et membre du Centre de recherche sur le vieillissement. Ses travaux, menés sous la direction du professeur Éric Goulet, portent sur l’hydratation et le vieillissement dans un contexte d’exercice. Il souhaite contribuer à l’avancement des connaissances dans le domaine du vieillissement physiquement actif, mais surtout transférer les connaissances à la population pour qu’elle en fasse une application concrète. « C'est ce que j'apprécie le plus, rendre les résultats de nos recherches accessibles à tous ». Pour cette raison, il aspire à une carrière en enseignement ou encore dans le domaine de la santé publique.

À propos du concours

L’Université de Sherbrooke tient annuellement le Concours de vulgarisation scientifique, dont les objectifs sont de stimuler des vocations en vulgarisation scientifique et d’augmenter le rayonnement des travaux de recherche qui s’effectuent à l’Université, qu’ils soient de nature fondamentale ou appliquée.


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