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Traitements prometteurs contre le SARM ou C. difficile

Une équipe de l’UdeS découvre une nouvelle classe d’antibiotiques

Jérôme Mulhbacher, François Malouin et Daniel Lafontaine.
Jérôme Mulhbacher, François Malouin et Daniel Lafontaine.
Photo : Michel Caron

Une équipe multidisciplinaire de l’UdeS a découvert une nouvelle classe d’antibiotiques efficace contre certaines bactéries à l’origine de maladies nosocomiales : l’antibiotique à base de ligand PC1. Ces résultats ouvrent une nouvelle voie de lutte contre des bactéries de plus en plus résistantes aux traitements conventionnels. Ils sont publiés ce jeudi  22 avril dans la revue PLoS Pathogens, par Daniel Lafontaine, professeur au Département de biologie de la Faculté des sciences, et son équipe en collaboration avec des chercheurs de la Faculté de médecine et des sciences de la santé.

«Les bactéries n’avaient encore jamais été exposées à ce nouvel antibiotique et ne développent pas de résistances, contrairement aux antibiotiques connus», affirme le professeur Lafontaine. Entre 2003 et 2005, le Québec a été particulièrement touché par une souche de la bactérie Clostridium difficile (C. difficile) hypervirulente et multirésistante, période pendant laquelle l’incidence des infections a presque quadruplé.

Louis-Charles Fortier
Louis-Charles Fortier
Photo : Robert Dumont

«Malheureusement, bien que l’épidémie soit maintenant endiguée, on rapporte encore des éclosions dans divers hôpitaux de la province malgré les mesures mises en place pour réduire l’incidence des infections nosocomiales», rapporte Louis-Charles Fortier, professeur au Département de microbiologie et infectiologie et l’un des coauteurs de l’étude. «La situation est similaire ailleurs au Canada et aux États-Unis, de même que dans plusieurs pays européens», ajoute le microbiologiste expert sur les questions du C. difficile.

«Pour C. difficile ou encore Staphylococcus aureus (SARM), même après 30 générations de bactéries exposées à la molécule PC1, nous ne détectons aucune résistance, alors qu’habituellement il suffit de cinq ou six passages», témoigne Daniel Lafontaine. Le domaine des antibiotiques conventionnels repose sur quelques produits clefs, comme la pénicilline, qui sont dérivés les uns des autres pour contrer l’adaptation constante des bactéries.

Cette nouvelle classe d’antibiotiques est composée d’une molécule synthétique qui se fixe spécifiquement sur une zone essentielle à la survie de la bactérie, appelée riboswitch, empêchant ainsi sa prolifération. Depuis la découverte des riboswitchs en 2002, les scientifiques cherchent à développer un antibiotique qui agit sur ces zones vitales, sans succès.

«Notre expertise dans l’étude tridimensionnelle des riboswitchs nous a permis de comprendre que ça fonctionne uniquement lorsque le riboswitch visé est devant un gène particulier appelé guaA, explique Daniel Lafontaine. Ça touche une voie de base de sa régulation.»

Les auteurs de la publication ont réussi à pousser leurs travaux de l’étude fondamentale du fonctionnement de l’antibiotique sur les riboswitchs jusqu’à l’expérimentation avec succès sur des modèles animaux.

«C’est une histoire complète, dit fièrement le professeur Lafontaine. Habituellement une étude aussi large est réservée à de très grands laboratoires. Dans notre cas, l’expertise était répartie sur plusieurs campus de l’UdeS, alors il a fallu la persévérance de Jérôme Mulhbacher, postdoctorant à la Faculté des sciences, qui a proposé le sujet et a contacté des collaborateurs avec qui nous n’avions jamais travaillé : François Malouin, professeur à la Faculté des sciences, expert en validation sur des modèles animaux, et Louis-Charles Fortier, à la Faculté de médecine et des sciences de la santé.»

Les chercheurs ont breveté les molécules développées et envisagent des rapprochements avec les entreprises fabricant de tels produits. De plus, pour étendre le spectre des bactéries touchées, ils cherchent maintenant d’autres riboswitchs qui régulent d’autres gènes essentiels. «L’avenir est dans le design de ligands spécifiques pour bloquer l’action des riboswitchs», conclut Daniel Lafontaine.


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