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Transmission sanguine du BPA de la mère au fœtus

Une étude de l'UdeS confirme la toxicité du bisphénol A pour le placenta

Aziz Aris, professeur au Département d'obstétrique et de gynécologie de la Faculté de médecine et des sciences de la santé
Aziz Aris, professeur au Département d'obstétrique et de gynécologie de la Faculté de médecine et des sciences de la santé
Photo : Robert Dumont

Une étude de l’Université de Sherbrooke confirme que le bisphénol A (BPA) compromet la santé du placenta, ce qui peut causer des complications durant la grossesse. Ces recherches, menées pour la première fois à partir de cellules placentaires et dirigées par le professeur Aziz Aris, mettent en garde la population contre l’augmentation inquiétante des concentrations de ce produit chimique dans le sang maternel et fœtal. Les résultats de cette étude ont été publiés récemment dans la revue internationale Toxicology and Applied Pharmacology.

«De très faibles concentrations équivalentes au centième de ce que l’on retrouve dans le sang de la femme enceinte sont capables d’affecter les cellules souches principales au développement du fœtus», révèle le chercheur en obstétrique-gynécologie de la Faculté de médecine et des sciences de la santé. «Les recherches indiquent que le bisphénol A est capable de traverser aisément le placenta pour se retrouver dans l’organisme du fœtus.»

L’étude du professeur Aris indique que les mécanismes toxicologiques dus à ce composé chimique peuvent mener à des problèmes de santé tels que la prééclampsie (une élévation rapide de la tension artérielle et une atteinte aux reins pendant la grossesse), des problèmes de croissance du fœtus, des naissances prématurées et des fausses couches.

Une réglementation nécessaire

Pour éviter la transmission du produit à leur bébé, les femmes enceintes devraient éviter de consommer des denrées en contact avec les plastiques alimentaires. Une chose plus facile à dire qu’à faire, souligne le professeur Aris : «Comme les fabricants n’ont pas l’obligation d’identifier la présence de BPA sur l’étiquetage de leurs produits, il devient très difficile de faire un choix éclairé.»

En 2008, le gouvernement du Canada était le premier à interdire l’usage du BPA dans la fabrication des biberons et des gourdes. Le gouvernement américain a récemment emboité le pas. «Cette mesure n’est toutefois pas suffisante, ajoute le chercheur. Il faudrait s’attaquer à toutes les sources d’exposition du BPA, notamment les bouteilles et les boîtes plastifiées utilisées comme contenants de boisson et de nourriture.»

Des études menées par Environnement Canada confirment que le BPA se décompose très lentement en l’absence d’oxygène et qu’il pénètre dans l’environnement par les eaux usées, les résidus de lavage et les filtres bactériens de décharge. «Si rien n’est fait, il faut s’attendre à plus d’accumulation de BPA dans nos eaux de consommation et nos organismes vivants, ce qui aura des répercussions sur la santé des populations», affirme Aziz Aris.

Le chercheur est connu pour ses travaux concernant les risques de la nouvelle alimentation sur la santé materno-fœtale. On lui doit notamment la mise en garde contre les méfaits de l’utilisation abusive des vitamines C et E chez les femmes enceintes.

Présent dans bien des plastiques alimentaires

Le bisphénol A est un composé chimique utilisé dans une large gamme de produits, notamment les contenants d'entreposage de denrées alimentaires dont les bouteilles d’eau réutilisables et certaines boîtes de conserve, le matériel médical ou encore les petits électroménagers et appareils électroniques de consommation.

Le BPA est connu pour interférer avec l’action des œstrogènes (hormones féminines) et l’on soupçonne qu’il peut conduire à des désordres hormonaux chez les deux sexes, à diverses maladies métaboliques ainsi qu’à certains types de cancer.