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Portrait

Le professeur Mathieu Robert transforme les déchets en matériaux durables

Transformer les résidus alimentaires et agricoles pour en faire des matériaux durables et performants. Tel est le défi original et visionnaire qui anime le professeur Mathieu Robert, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les éco-composites polymères. Récipiendaire d’un prix Tremplin 2018, le trentenaire s’estime choyé par une vie qu’il construit selon ses propres règles, basées autour de la liberté, de l’engagement et du respect des communautés. Portrait de cet ingénieur en matériaux —qui n’a jamais l’impression de travailler — professeur au Département de génie civil et de génie du bâtiment.

Mathieu Robert, professeur au Département de génie civil et de génie du bâtiment de la Faculté de génie
Mathieu Robert, professeur au Département de génie civil et de génie du bâtiment de la Faculté de génie
Photo : Michel Caron - UdeS

De la fibre de carotte en passant par les résidus de pommes de terre, la paille et autres épluchures… les déchets agricoles jouissent d’un énorme potentiel économique et environnemental, souvent ignoré. Un constat d’autant plus accablant que le Canada, l’un des grands producteurs agricoles dans le monde, génère une quantité mirobolante de déchets qui ne sont pas valorisés.

On ne fait absolument rien en Amérique du Nord avec les déchets! Des milliers de tonnes sont jetées comme biomasse aux champs, mais c’est plein de fibres et polymères biosourcés qui peuvent être utilisés pour remplacer des fibres synthétiques qui coûtent cher à produire au niveau énergétique.

Pourquoi s’intéresser à la valorisation des déchets?

Formé en génie des matériaux, le jeune chercheur souhaitait travailler sur un sujet atypique qui nourrirait sa fibre intellectuelle et sa soif d’agir concrètement pour la société.

Je voyais que des gens faisaient des matériaux durables pour des applications en génie civil, mais très peu de gens avec une formation en génie ou sciences des matériaux travaillaient dans des applications pour le bâtiment et les infrastructures.

Mathieu Robert développait déjà des matériaux d’avant-garde dans le cadre de ses études postdoctorales à l’Université de Queen. Parce qu’il était à ce moment boursier de grand mérite du CRSNG, il bénéficiait dès lors d’une très grande liberté académique, un statut essentiel à ses yeux.

La liberté et les communautés d’abord

C’est d’ailleurs cette insatiable envie de liberté d’action et de pensée qui a influencé le récipiendaire du prix Tremplin à embrasser une carrière de professeur universitaire.

Ce que je veux, c’est inventer. J’ai besoin d’être nourri. Le milieu académique me permet une très grande liberté. La créativité pour moi est primordiale!

À cet effet, l’on ne peut ignorer l’influence colossale qu’a eue son père, Simon, décédé trop jeune, sur sa destinée professionnelle. Grand intellectuel et libre penseur, ce dernier enseignait l’économie au secondaire. Son fort  intérêt pour l’économie sociale et communautaire a aussi eu un impact majeur dans les choix de son fils, pour qui le fait de soutenir les petites communautés est source de grande valorisation. Préoccupé par les régions éloignées qui font face à de grandes problématiques de gestion des matières résiduelles sans bénéficier d’appuis suffisants, le professeur Robert se fait naturellement un devoir « d’utiliser la science pour ceux qui en ont besoin ». Il se désole que la plupart des matériaux que l’on développe aujourd’hui se fassent à partir de matières synthétiques et fossiles, qui génèrent des gisements importants de déchets que l’on pourrait chercher à exploiter.

On doit respecter la communauté et la société qui nous permettent de travailler. Je gagne ma vie de façon exceptionnelle. Je n’ai même pas l’impression de travailler! C’est obligatoire de travailler aussi fort par respect pour la société et la communauté; on est privilégié.

Son intérêt pour la valorisation des déchets ne date pas d’hier. Il a toujours été intéressé par la durée de vie des déchets et ce que l’on en faisait par la suite.
Son intérêt pour la valorisation des déchets ne date pas d’hier. Il a toujours été intéressé par la durée de vie des déchets et ce que l’on en faisait par la suite.
Photo : Michel Caron - UdeS

Le profond humanisme du professeur Robert ne fait aucun doute. Lorsqu’on lui demande quel est le plus grand accomplissement de sa carrière, bien au-delà de l’obtention de sa prestigieuse chaire de recherche, c’est le recrutement à titre de professeurs de ses deux premiers étudiants au doctorat, qu’il mentionne d’emblée.

Ça m’a ému de façon très sincère. Les préparer, les mettre sur la mappe pour continuer nos collaborations et nos activités par la suite, créer de nouvelles choses avec eux.

Si le professeur Robert souligne bien humblement qu’il ne « sauvera pas personne du cancer en faisant ce qu’[il] fait; que d’autres ont fondamentalement des impacts plus grands », ses idées prometteuses se traduisent pourtant en réalisations exceptionnelles pour la pérennité de nos sociétés. Ultimement, ses résultats de recherche contribueront à bâtir l’industrie propre de demain en pavant la voie aux matériaux écologiques à haute performance.

Le prix Tremplin en recherche et en création est remis chaque année à des membres du corps professoral qui apportent une contribution exceptionnelle à la recherche et à la création à l’Université de Sherbrooke. Ces personnes sont reconnues pour leur intégrité et leur adhésion aux valeurs de notre institution. Ce prix vise à soutenir les professeures et professeurs en début de carrière afin qu’ils puissent repousser les frontières de la recherche et de la création dans un large éventail de disciplines.


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