Aller au contenu

Comprendre le rôle de la stigmatisation pendant le développement de l'adolescent

La Faculté d'éducation accueille une Chaire de recherche du Canada sur la stigmatisation et le développement psychosocial

La titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la stigmatisation et le développement psychosocial, Pre Alexa Martin-Storey, du Département de psychoéducation
La titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la stigmatisation et le développement psychosocial, Pre Alexa Martin-Storey, du Département de psychoéducation
Photo : UdeS

Qu'elle soit liée à l'appartenance à une minorité, au statut socioéconomique, à l'ethnicité, ou à d'autres causes, la stigmatisation entraîne de nombreuses conséquences qui varient tout au long de la vie des personnes qui la subissent. À l'adolescence, par exemple, l'influence du contexte social des jeunes sur leur réussite scolaire s’intensifie de manière substantielle. Cette intensification est un défi important pour ceux dont l’identité est stigmatisée, qui est aussi une identité dévalorisée – une dévalorisation qui a de graves conséquences sur leur adaptation sociale, leur réussite scolaire et leur santé mentale, sans oublier que ces jeunes sont à risque élevé de vivre des difficultés psychosociales. Paradoxe ultime : ces jeunes sont également susceptibles de recevoir des services institutionnels de moindre qualité que ceux dont profitent les jeunes non stigmatisés – d'où l'importance de faire avancer la recherche.

Le but de la Chaire de recherche du Canada sur la stigmatisation et le développement psychosocial, dirigée par la professeure Alexa Martin-Storey de la Faculté d'éducation, sera donc de comprendre comment la stigmatisation façonne l’adaptation sociale, la réussite scolaire et le bien-être de ces jeunes au fil du temps, en accordant une importance spécifique à l'adolescence et à la transition vers l'âge adulte. Centré sur la stigmatisation elle-même, le programme de recherche mis de l'avant par la titulaire adopte une perspective développementale et une approche comparative interdisciplinaire pour mieux saisir cet impact.

Trois axes de recherche

Les travaux réalisés par la Chaire seront articulés selon trois axes reflétant les types de stigmates subis par les jeunes (stigmates liés à l'appartenance à une minorité sexuelle, au statut socioéconomique ou à l'ethnicité), la diversité des identités stigmatisées et les façons d'améliorer les services offerts aux jeunes stigmatisés.

Axe A : identifier les facteurs de risque et de protection qui expliquent les conséquences des stigmates chez les groupes d'adolescents à risque, en particulier auprès des jeunes faisant partie de minorités sexuelles

Cet axe de recherche fera l'objet de deux projets interreliés fondés sur des données longitudinales. Le premier permettra de repérer les facteurs spécifiques ayant une influence positive ou négative sur les résultats scolaires et la vie sociale des adolescents faisant partie de minorités sexuelles, tandis que le second jettera un éclairage sur les risques contextuels liés au harcèlement et aux agressions sexuelles pour ces élèves.

Axe B : l'adolescence et les stigmates liés au statut socioéconomique

Cinq décennies de recherche ont démontré que les jeunes de toutes les classes sociales entretiennent des perceptions négatives à l'égard des personnes défavorisées. Ce que nous connaissons moins, toutefois, c'est le mode d'intériorisation de ces jugements subjectifs par l'enfant. Ainsi, deux projets de recherche distincts permettront une meilleure compréhension de la façon dont les perceptions liées à la pauvreté influencent le comportement et le rendement scolaire des jeunes défavorisés et de clarifier les liens entre ces perceptions et le cycle de l'infériorité économique. Ces projets permettront en outre de mieux comprendre pourquoi et comment l'importance de ces perceptions surpasse souvent celle de l'évaluation objective du statut socioéconomique d'une personne.

Le premier de ces deux projets sera centré sur la conception d'un outil de mesure de la perception qualitative du statut socio-économique par les adolescents. L'envergure et la durée de ce projet, qui couvrira trois sites de recherche situés au Canada et aux États-Unis, favorisera une validation accrue de cette mesure prise sur un groupe d'adolescents plus diversifié, selon une approche longitudinale mixte. Quant au second projet, centré sur la mesure des perceptions des adolescents face au milieu et au contexte de vie des personnes, il cherchera à expliquer l'effet de ces perceptions et d'identifier comment les facteurs individuels des ados se conjuguent avec elles, afin de mieux prédire les effets sur leur rendement scolaire et de faciliter les ajustements psychosociaux nécessaires.

Axe C : les stigmates dans le quotidien des adolescents

Malgré une abondance de données sur les effets de la stigmatisation sur le bien-être et la santé mentale, peu de recherches se sont attardées à la description des processus qui expliquent ces effets au jour le jour. Également déployé en deux projets distincts, cet axe de recherche fait donc appel à des approches innovantes pour mieux comprendre cette influence sur le quotidien des personnes touchées. Le premier projet recensera l'utilisation des ressources et services publics par les personnes dont l'identité est stigmatisée, qui sont souvent lourdement désavantagées dans leurs rapports avec les institutions d'enseignement et de services sociaux. Jusqu'ici, assez peu de recherches ont visé une meilleure compréhension de la variation de ces expériences au fil de la vie des personnes touchées. Le second projet sera quant à lui centré sur les effets de la stigmatisation sur l'utilisation du temps au quotidien, en fonction de différents types d'identités stigmatisées. Si nous connaissons déjà bien les différences entre le bien-être et la santé générale des personnes homosexuelles et hétérosexuelles, la recherche n'a commencé que récemment à s'intéresser à la manière dont ces différences se traduisent en comportements chez l'individu.

S'appuyant sur de nombreuses collaborations à l'échelle nationale et internationale, ce programme de recherche se distingue notamment par la diversité des identités stigmatisées qui seront recensées. Cette diversité permettra de dégager des principes universels qui régissent les mécanismes expliquant les variations dans l'adaptation sociale et scolaire des jeunes stigmatisés, ainsi que les spécificités liées à ce type d’identité. Ces deux aspects sont importants pour aider les jeunes vulnérables, étendre et ajuster les théories reliées à la stigmatisation, identifier des pistes d’intervention et, dans une optique de prévention, élaborer des modules de sensibilisation et de formation pour les enseignants et les intervenants.

Membre du Groupe de recherche sur les inadaptations sociales de l'enfance (GRISE) de l'UdeS, la professeure Alexa Martin-Storey est chercheure à la Faculté d'éducation depuis 2013. La titulaire s'est maintes fois distinguée par la portée et les effets de ses recherches sur de nombreux types de stigmatisation (santé mentale, bien-être, santé physique, contexte familial), notamment sur les jeunes des minorités sexuelles.


Informations complémentaires