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Un des textes gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2019

Une empreinte pour prédire la réponse des patients aux traitements anti-cancéreux

À la recherche d’une empreinte…
À la recherche d’une empreinte…
Photo : Pixabay

Entrez dans la peau du célèbre détective Sherlock Holmes. Une loupe à la main à la recherche du moindre indice pour résoudre votre énigme… C’est exactement ce rôle de détective que l’équipe du professeur François-Michel Boisvert, chercheur au Département d’anatomie et de biologie cellulaire de l’Université de Sherbrooke, a décidé d’endosser. L’énigme ? Identifier une « empreinte » capable de prédire la réponse au traitement des patients atteints de cancer du rectum. Publiés en 2018 [1], les résultats préliminaires de cette enquête sont très encourageants pour les patients résistant au traitement et pourraient servir d’exemple pour d’autres types de cancer.

Une enquête à mener…

L’intrigue débute au Centre Hospitalier Universitaire de Sherbrooke (CHUS). Vingt-trois patients atteints de cancer rectal sont admis pour être soignés selon un traitement standard dispensé au Canada. Ce traitement est une stratégie qui consiste à affaiblir l’ennemi pour mieux le vaincre. Les patients reçoivent des rayons appliqués sur la tumeur – c’est la radiothérapie – ainsi qu’un médicament appelé 5-fluorouracile – c’est la chimiothérapie. La taille de la tumeur est alors diminuée et elle est plus facile à retirer. Cette stratégie d’attaque s’avère être profitable pour près de 70% des patients [2]. Malheureusement, les 30% des patients restants ne répondent pas au traitement et subissent les dommages collatéraux de cette stratégie agressive…

C’est là que l’équipe du professeur Boisvert entre en jeu pour mener l’enquête. L’objectif : identifier le ou les coupables de cette résistance en recherchant une « empreinte » spécifique. Pour cela, les chercheurs ont utilisé un outil un peu particulier…

La spectrométrie de masse pour rechercher cette empreinte

Au cours de cette enquête, les chercheurs ont travaillé à partir d’échantillons provenant des tumeurs rectales de vingt-trois patients pris en charge au CHUS. Ils ont été capables d’en extraire les « protéines », des entités microscopiques possédant de nombreuses fonctions nécessaires au bon fonctionnement de nos cellules et donc du corps humain. Il en existe environ 100 000 différentes chez l’homme. C’est à partir du contenu protéique des échantillons tumoraux que l’équipe a identifié une empreinte associée à la résistance au traitement.

Comment ça marche ? La spectrométrie de masse suit le même principe qu’un logiciel de reconnaissance faciale. Le contenu protéique des tumeurs est analysé puis comparé à une base de données. Il est ainsi possible de mettre un nom sur chaque protéine présente dans l’échantillon et d’en mesurer sa quantité. Finalement, en comparant les protéines identifiées chez les patients sensibles avec celles retrouvées chez les patients résistants, les chercheurs ont pu mettre des noms sur les coupables de la résistance à la radio-chimiothérapie. Cela a permis d’identifier une empreinte spécifique.

Aujourd’hui, ils travaillent avec plus de 150 nouveaux patients atteints de cancer rectal afin de rassembler des preuves pour renforcer leurs résultats.

Quelles avancées pour le futur ?

Anaïs Chauvin, doctorante et candidate au Ph. D. au département d'anatomie et de biologie cellulaire
Anaïs Chauvin, doctorante et candidate au Ph. D. au département d'anatomie et de biologie cellulaire
Photo : Michel Caron - UdeS

Chez les patients atteints de cancer du rectum, détecter cette empreinte spécifique constituerait la preuve de l’inefficacité de la radio-chimiothérapie future. Ces patients n’auraient alors pas à subir inutilement les dommages collatéraux dus à ce traitement. De plus, cette étude pourrait être appliquée aux autres types de cancer ainsi qu’à d’autres maladies.

La découverte d’une empreinte tumorale capable de guider les médecins dans une stratégie d’attaque particulière représenterait une avancée majeure dans l’avènement de la médecine personnalisée. Un patient : un traitement !

Bibliographie

[1]  Chauvin A., Wang C.-S., Geha S., Garde-Granger P., Mathieu A.-A., Lacasse V. et Boisvert F.-M. The response to neoadjuvant chemoradiotherapy with 5-fluorouracil in locally advanced rectal cancer patients: a predictive proteomic signature. Clinical Proteomics. 2018; 15: 16.

[2]  García-Flórez L.-J., Gómez-Álvarez G., Frunza A.-M., Barneo-Serra L., Martínez-Alonso C., Fresno-Forcelledo M.-F. Predictive markers of response to neoadjuvant therapy in rectal cancer. Journal of Surgical Research. 2015; 194: 120–6.

À propos d'Anaïs Chauvin
Anaïs Chauvin est étudiante au doctorat, candidate au Ph. D. au Département d’anatomie et de biologie cellulaire. Elle concentre ses recherches sur l’identification de biomarqueurs protéiques qui seraient capables de prédire la réponse au traitement chez les patients atteints de cancer du rectum. Elle utilise principalement la spectrométrie de masse pour ses études, notamment grâce à la plateforme dirigée par son directeur de recherche, le Pr François-Michel Boisvert. C’est la troisème année qu’elle participe au concours de vulgarisation scientifique : « J’aime écrire et c’est encore plus stimulant d’écrire pour faire partager ma passion aux gens qui nous entourent. »

À propos du concours
L’Université de Sherbrooke tient annuellement le Concours de vulgarisation scientifique, dont les objectifs sont de stimuler des vocations en vulgarisation scientifique et d’augmenter le rayonnement des travaux de recherche qui s’effectuent à l’Université, qu’ils soient de nature fondamentale ou appliquée.


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