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Reportée - Philosophie pratique et décolonisation des savoirs | Colloque international

Date :
Cet événement est passé.
Type :
Colloques et congrès
Lieu :
Campus de Longueuil, Université de Sherbrooke

Description :

Ce colloque annuel en philosophie pratique rassemblera des philosophes et des étudiant.es aux cycles supérieurs et chercheurs.es en sciences humaines de tous horizons intéressés.es par la philosophie pratique. Les contributions s’inscriront dans différentes disciplines, traditions et courants de pensée, et ce, bien que la présente édition accorde une attention particulière à la décolonisation des savoirs.

Au Canada et au Québec, comme dans le monde académique occidental en général, l’heure est à la représentativité des corps enseignants et des cohortes étudiantes eu égard à la pluralité ethnoculturelle. Il s’agit de corriger diverses formes de sous-représentation affectant les disciplines traditionnelles (et la philosophie plus que les autres), en introduisant des mesures d’inclusion, de discrimination positive ou encore des quotas. Dans cette perspective, que l’on peut appeler " libérale ", la cible de ces mesures concerne l’accès et le maintien aux études, l’équité dans l’accès à l’emploi et à la recherche, pour réparer diverses formes de discrimination systémique anciennes ou plus récentes. Ces mesures prennent rarement en compte les pratiques et les idéaux internes de la discipline (rationalité, objectivité, universalité, spécialisation, professionnalisation) : il s’agit d’ajouter de la diversité parmi les philosophes, pas dans la discipline ou de questionner ce que fait le ‘canon’ traditionnel (“ add-X-and-stir ” problem : Warren 2009).

Les critiques postcoloniales/décoloniales des dernières décennies vont au contraire dans ce dernier sens (Mbembe 2006), tout comme les critiques féministes d’aujourd’hui (Hasslanger 2008). La revendication et le projet de ‘décoloniser’ la philosophie, ainsi que les autres disciplines et le monde universitaire plus largement, s’attardent aux méthodes, valeurs et institutions générant en philosophie une injustice, voire une violence épistémique, ainsi qu’une dévalorisation durable des corps et des subjectivités (Godrie et Dos Santos 2017). Ce genre d’injustice concerne moins l’accès aux études et l’équité en emploi que la production du savoir dans des contextes de pouvoir défavorables aux penseurs.es des pays anciennement colonisés (De Sousa Santos 2017), aux groupes minoritaires et aux personnes racisées en Occident (Hamrouni et Maillé 2105). Les enjeux soulevés par ces questions ne sont pas seulement académiques et locaux, mais historiques, socio-politiques et globaux, aussi bien dans l’espace (géopolitique des connaissances, Kavwahirehi 2008, Kisukidi 2015) que dans le temps (histoire de la philosophie, Diagne 2017, König-Pralong 2019).

Que signifierait réparer cette injustice, ouvrir la philosophie aux autres expériences de la modernité et aux autres types de savoirs (Grosfoguel 2010)? Quels moyens (épistémologiques, méthodologiques, pédagogiques, curriculaires, interdisciplinaires, institutionnels, sociaux) mettre en oeuvre pour opérer cette décolonisation? Et qui en portera la responsabilité? Les groupes et personnes qui estiment en faire les frais, bien sûr, en proposant une critique du racisme et en proposant des voies épistémiques nouvelles, mais aussi les praticiens.nes de la philosophie en posture privilégiée (Bessone 2015, Abadie 2018), et cela, non par paternalisme, mais par souci de « désapprentissage … de l’esprit spontané de domination » (Williams 1958).