SOMME TOUTE... L'UNIVERSITÉ

Le 27 février 1997, après quelques semaines d'une campagne électorale qui l'a opposé à Alain Caillé, son ancien vice-recteur à la recherche, Pierre Reid a été réélu recteur de l'Université de Sherbrooke. SOMMETS a rencontré celui qui a entrepris, le 1er juin, un second mandat à la tête de l'établissement d'enseignement.

Durant son second mandat comme recteur

Pierre Reid veut préserver la qualité de l'enseignement

par Bruno Levesque

Lors de l'entrevue qu'il avait accordée à SOMMETS quelques semaines avant d'entreprendre son premier mandat à la barre de l'Université de Sherbrooke, en 1993, le recteur Pierre Reid avait parlé des restrictions budgétaires auxquelles il aurait à faire face. Il avait même avoué ressentir un léger vertige devant l'ampleur de la tâche qui l'attendait.

Quatre ans plus tard, Pierre Reid se souvient très bien : <<Mes collègues et moi évoquions avec horreur des scénarios comprenant des compressions de 11 millions de dollars en cinq ans. Quatre ans plus tard, je peux dire que les compressions ont été deux fois plus importantes que le pire scénario imaginé. Et, malheureusement, ce n'est pas terminé...>>

Au cours de son premier mandat, Pierre Reid a donc dû gérer la décroissance, c'est-à-dire négocier des incitatifs à la retraite avec les syndicats, fermer des postes, réduire les budgets des facultés et des services, etc., des tâches qui n'ont rien de bien emballant. Aussi a-t-il longuement réfléchi avant de solliciter un second mandat. Il savait que d'autres compressions budgétaires seraient à faire, que le prochain mandat s'annonçait aussi difficile que le premier.

Les Alpes, pour pédaler et réfléchir

Depuis longtemps amateur de cyclisme, le recteur Pierre Reid a découvert, il y a quelques années, un mode de vacances qui lui permet de refaire ses forces, tant mentales que physiques : le vélocamping. Chaque été, pendant environ un mois, il parcourt des milliers de kilomètres avec pour seuls bagages son vélo et son matériel de camping.

Ces voyages tiennent un peu de la retraite fermée. Le recteur choisit des parcours accidentés, difficiles, afin que le défi en vaille la peine pour un cycliste aguerri comme lui. Par exemple, l'été dernier, le recteur a choisi de pédaler dans les Alpes.

Comme le dit Pierre Reid, le cyclocamping est une activité très différente de son travail. La journée de travail d'un recteur est très fractionnée. Il est constamment entouré de gens. Certains jours, il peut travailler à des dizaines de dossiers et voir plus d'une centaine de personnes. En vélocamping, il est le plus souvent seul avec toujours le même objectif en tête. La montagne est là. L'objectif est d'arriver au sommet.

Ses aventures à vélo permettent bien sûr à Pierre Reid de refaire le plein d'énergie. Mais le recteur en profite aussi pour réfléchir. <<Savoir si je me représentais ou non pour un second mandat a été l'objet de mes réflexions pendant toutes les vacances de l'été dernier, raconte-t-il. J'ai un calepin rempli de réflexions à ce sujet que je griffonnais le soir avant d'aller sous la tente.>>

Ainsi, c'est en se mesurant aux cols alpins les plus abrupts que Pierre Reid a décidé de relever les défis que lui lançait une université sise au flanc du mont Bellevue.

Allier compressions et développement

<<Dans les circonstances actuelles, je crois qu'il fallait que l'Université soit dirigée par une personne capable à la fois de faire face à de nouvelles compressions de budget sans détruire l'Université, en s'assurant que l'Université puisse poursuivre son développement, analyse Pierre Reid. Je pense que j'ai démontré, au cours de mon premier mandat, qu'il est possible de procéder à des compressions sans toucher à ce qui constitue l'essentiel de l'Université.>>

Au cours de son second mandat, Pierre Reid entend travailler au contrôle des dépenses, tout en stimulant le développement. Le recteur parle d'un équilibre souhaitable entre les objectifs budgétaires et la qualité de l'enseignement. <<De tempérament, je suis davantage intéressé au développement qu'au contrôle, dit-il. Par contre, je sais très bien qu'on ne peut pas développer, si on n'exerce pas un contrôle adéquat. Il faut prendre nos responsabilités et accepter de participer à l'effort de réduction du déficit du Québec. Il faut aussi, dans un tel contexte, veiller à maintenir la santé financière de l'Université, la qualité de l'enseignement que nous offrons et préserver notre capacité de décerner des diplômes de qualité au moins comparable à celle des autres universités au Canada et ailleurs dans le monde.>>

Dans l'actuel contexte financier, préserver la qualité de l'enseignement offert et des diplômes décernés ne sera pas une mince tâche. La communauté universitaire devra une fois de plus faire preuve de son sens de l'innovation. <<Le gros dilemme des années qui viennent, résume Pierre Reid, sera de garder une formation de qualité avec moins de professeures et professeurs. Il s'agit d'un dilemme important qui n'est pas encore résolu. Nous avons encore beaucoup d'efforts à faire pour y arriver.>>

Pierre Reid propose donc des mesures susceptibles de pallier cette réduction du personnel enseignant, tout en préservant la valeur de la formation prodiguée : diversifier les contacts pédagogiques offerts aux étudiantes et étudiants, favoriser une plus grande autonomie de ceux-ci, mieux utiliser le personnel enseignant et stimuler la collaboration entre les professeures et professeurs enseignant des matières similaires dans des facultés différentes. Pour atteindre ces objectifs, les outils informatiques, tels Internet, les banques de données consultables à distance et le multimédia, pourraient s'avérer d'une grande utilité.

L'Université en l'an 2000

Et à quoi Pierre Reid voudrait-il que l'Université ressemble le 31 mai 2001, dernier jour de son second mandat? Il souhaite que l'Université de Sherbrooke soit encore, dans les faits, reconnue comme l'Université la plus dynamique au Québec, la plus entrepreneuriale et la plus innovatrice. Il voudrait aussi qu'elle soit toujours connue pour l'importance qu'elle accorde aux aspects pratiques de la formation, en particulier pour son régime coopératif. <<Mais le plus important, dit-il, serait que l'Université ait conservé son dynamisme interne. Pour favoriser cela, il faut faire en sorte que l'esprit d'initiative demeure le moteur numéro un de l'évolution de l'Université de Sherbrooke>>

L'Université de Sherbrooke perd un de ses bâtisseurs

Décès de Monseigneur Roger Maltais

Mgr Roger Maltais, seule personne qui a vécu de l'intérieur les 25 premières années de l'Université de Sherbrooke, s'est éteint le samedi 19 avril 1997, à l'âge de 82 ans. Mgr Roger Maltais faisait partie des pionniers réunis en secret le 1er août 1953 pour examiner la possibilité de fonder une université à Sherbrooke. Une fois l'Université de Sherbrooke créée, il a été pendant 10 ans doyen de la Faculté des arts. Nommé vice-recteur en 1964, il a accédé au poste de recteur en 1965. Pendant 10 ans, il a dirigé la jeune université dont il a été le troisième recteur et aussi le dernier recteur ecclésiastique.

Sous son rectorat, l'Université de Sherbrooke a été la première université au Québec et la deuxième au Canada à instituer le régime coopératif, qui permet une alternance de sessions d'études et de stages rémunérés en entreprise. Elle a été aussi la première au monde à offrir le M.B.A. en français. Et elle est devenue la seule université située à l'extérieur des grands centres urbains du Québec à compter une faculté de médecine et une faculté de droit.

Dans un article portant sur Mgr Maltais qu'il signait dans le numéro spécial de SOMMETS consacré au 40e anniversaire de l'Université (Automne 1994), Hubert Wallot, qui a étudié à l'Université quand Mgr Maltais en était le recteur, avait écrit à son sujet : <<Je crois pouvoir dire qu'il a été le recteur qui a permis à son université de se développer à un rythme rapide et même dans des directions qu'il n'avait pas prévues. Affirmer de telles choses constitue un compliment. Roger Maltais fut dans l'ensemble un recteur respectueux et respectable, sobre et efficace, qui collait à son époque et qui mérite tout notre respect. D'autres institutions universitaires n'ont pas eu cette chance!>>

Décès d'un pionnier de l'Université

Rosario Cousineau meurt à 89 ans

Rosario Cousineau est décédé le 3 avril 1997 à l'âge de 89 ans. Il a été directeur des études, vice-doyen et doyen de la Faculté de commerce de Sherbrooke avant qu'elle devienne la Faculté d'administration. Il en était le doyen lorsque la faculté s'est installée sur le campus. Rosario Cousineau était licencié des universités de Montréal et de Columbia et titulaire d'un doctorat de l'Université d'Ottawa. Les étudiantes et étudiants qui l'ont connu se souviendront de ses qualités d'administrateur, mais aussi de son grand humanisme et de son souci constant d'aider les gens qu'il côtoyait.