Apprendre sur soi… en enseignant au Nicaragua
STÉPHANIE RAYMOND
Elles sont parties pour enseigner. Elles ont finalement beaucoup appris
aussi, peut-être plus que ce qu'elles ont pu transmettre. Emmy Bernier et
Karine Demers, étudiantes au baccalauréat en enseignement au préscolaire et
au primaire, parlent avec du feu dans les yeux de leurs cinq semaines
d'enseignement du français à des enfants du Nicaragua.
Les deux étudiantes ont monté leur projet de A à Z. «Mon copain est
originaire du Nicaragua et nous avions la possibilité de loger chez sa sœur
à Managua, la capitale, explique Karine Demers. Et nous avons vu sur
Internet que l'Alliance française avait mis sur pied un projet pilote
d'enseignement du français dans des écoles du Nicaragua. L'Alliance a
accepté notre offre de collaboration.»
Du 6 mai au 28 juin, Emmy et Karine ont enseigné leur langue dans cinq
écoles de Managua, de la plus pauvre à la plus riche, à raison d'une semaine
par école. «Il y avait de grands écarts entre le niveau de français des
différentes écoles. Dans la plus pauvre, le niveau était très bas, chez les
enfants et les professeurs, indique Karine Demers. Le matériel scolaire se
résumait à un livre et un crayon, les classes étaient séparées par des
paravents, la chaleur était écrasante, il n'y avait ni fenêtre ni
éclairage... Mais les enfants étaient les plus attachants. Ils étaient
curieux et venaient vers nous, alors que les enfants des écoles riches nous
manquaient de respect.»
L'Alliance française a demandé conseil aux étudiantes avant leur départ.
«Nous avons suggéré de former et de suivre davantage les professeurs, et
aussi de monter un programme pour eux. Car ils se contentent souvent de
bourrer le crâne des enfants de matière à apprendre par cœur», affirme Emmy
Bernier.
Apprentissage de soi
L'adaptation a été un peu difficile, mais les deux étudiantes s'en sont
très bien tirées grâce à leur sens de l'humour. «Nos plans étaient souvent
dérangés, il a fallu parler et enseigner en espagnol plus que prévu, et
aussi apprendre à vivre à deux 24 heures par jour. Mais tout s'est bien
passé, car on prenait tout avec humour», affirme Emmy. «On en a tellement
appris sur nous-mêmes, renchérit Karine. Sur notre personnalité, nos forces
et nos faiblesses, notre capacité d'adaptation... J'ai moi-même dû
fonctionner malgré une infection intestinale qui a duré six semaines.»
De l'argent, des vêtements et du matériel scolaire qu'elles devaient
offrir à une école de filles de familles défavorisées sont arrivés par la
poste seulement trois jours avant leur départ. «L'aide humanitaire était
aussi importante dans notre projet que l'enseignement. Et à la fin, je
croyais qu'on ne recevrait jamais nos boîtes. Ça a été une bénédiction quand
elles sont arrivées à la dernière minute!» indique Karine.
Planifier les besoins de base
Les deux étudiantes ont aussi dû apprendre à planifier leurs besoins de
base. «Là où on habitait, il n'y avait pas d'eau à certains moments de la
journée. Chaque matin, il fallait vérifier s'il y avait assez d'eau pour la
journée, pour se laver et aller aux toilettes. De plus, les écoles les plus
pauvres n'avaient ni eau ni toilette. Cela nous a fait revenir aux besoins
primaires, et c'est là qu'on a réalisé l'importance de l'eau», explique Emmy.
Ce qu'Emmy et Karine retiennent davantage des habitants du Nicaragua? «Leur
accueil. Nous avons été accueillies comme des reines. Et aussi leur joie de
vivre. Les Nicaraguayens se contentent de peu, en autant qu'il y ait de la
danse et de la musique!» indique Emmy.
Cette expérience fait partie des projets spéciaux de deux crédits que
peuvent réaliser les étudiantes et étudiants en enseignement au préscolaire
et au primaire entre leur troisième et dernière année d'études. «Je souhaite
à tout le monde de vivre une expérience semblable, conclut Karine Demers.
Cela amène un grand sentiment d'accomplissement personnel, en plus de nous
ouvrir des portes, et aussi l'esprit!» Toute personne intéressée peut
contacter Karine ou Emmy aux adresses suivantes :
karineg99@hotmail.com ou
emmylavie@hotmail.com.
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