Liaison, le journal de l'Université de Sherbrooke, 6 février 2003

 

Argentine 2003 : le début d’une grande aventure

AudrÉe Montpetit
Journaliste pigiste

Après plusieurs mois d’activité fébrile, le 29 janvier dernier fut enfin le jour J pour les 8 membres d’Écologie Sans Frontière. Ceux-ci ont quitté les températures hivernales du Québec pour les chaleurs sub-tropicales d’Entre Rios, une province de l’Argentine où ils effectueront durant les trois prochains mois un stage en écologie dans un contexte de coopération internationale.

Qu’accompliront exactement ces huit biologistes fraîchement diplômés? Notre mandat est complexe, déclare Frédéric Branch, un des membres de ce groupe. Le programme consiste officiellement en une contribution à des études biologiques déjà en cours dans le cadre d’un projet nommé Préservation et utilisation de l’écosystème de la Province d’Entre Rios. Il s’agit en fait d’un projet de développement social dans un milieu d’agriculteurs peu aisés. Il relève à la fois d’un organisme communautaire argentin, le Programa Social Agropecuario et de la faculté des sciences de l’agriculture de l’Université d’Entre Rios.

Mais, comme c’est souvent le cas en coopération internationale, la version officieuse est un peu plus floue. Une des premières missions du groupe est de prendre connaissance du milieu écologique mais aussi de la réalité des populations locales. "Un des grands défis que les gens ont à relever dans cette région est de favoriser le développement humain de ces populations relativement pauvres sans détruire le milieu", explique Mme Colette Ansseau, professeure au département de biologie et fondatrice de l’association Écologie Sans Frontière. Les participants devront donc travailler à "imaginer une gestion du territoire qui préserve les forêts au maximum tout en assurant le développement du bien-être des populations", continue-t-elle. Une avenue intéressante pourrait être les ressources autres que le bois qui se retrouvent dans ces forêts, comme les champignons ou les plantes médicinales, et qui pourraient éventuellement être exploitées. La véritable tâche des étudiants est donc de mettre leurs connaissances et leur créativité au service du projet et des gens qui l’encadrent.

Le groupe Argentine 2003 s’est formé sans tambour ni trompette, il y a à peu près quinze mois. Ses huit membres ont tous beaucoup voyagé et certains ont effectué des projets de coopération dans différents coins du globe (Turquie, Mexique, République Dominicaine, etc.). Le choix de la destination s’est arrêté sur l’Argentine en raison des contacts que possédait Lila Gagnon-Brambilla, une membre du groupe, dont la mère est Argentine. Le projet est donc particulier puisque des liens très personnels y sont établis, en plus des nombreux contacts professionnels.

Un projet d’une telle envergure nécessite beaucoup de préparation et c’est en seulement six mois que les participants en ont organisé les multiples détails. Plus de 25 000 dollars étaient nécessaires à la réalisation du voyage. Les étudiants ont travaillé d’arrache-pied pour obtenir cette somme avec différentes activités de financement : sollicitation de dons auprès de compagnies, d’institutions et de communautés religieuses, vente de maillots, organisation de soirées au Kudsak, emballage de marchandises dans les grands magasins et les supermarchés. Le grand bienfaiteur s’est cependant présenté sous les traits de l’Office Québec-Amérique pour la Jeunesse, qui a fourni presque 9000 dollars pour appuyer le projet. Un grand soupir de soulagement pour les étudiantes et étudiants qui doutaient parfois d’amasser le montant total…

Les participantes et participants ont également suivi plusieurs cours d’espagnol et une formation intensive sur la vie de groupe en plus d’avoir peaufiné leurs connaissances scientifiques pour emporter là-bas le plus gros bagage possible.

Mais quelles sont les motivations qui poussent à travailler si fort? "Je voulais aller chercher une expérience de travail en biologie à l’étranger. Le côté développement durable est également une grande motivation pour moi ainsi que le fait que le projet se déroule dans un pays où l’on parle espagnol. Cela me permettra de solidifier cette langue et éventuellement de poursuivre d’autres projets dans d’autres pays d’Amérique du Sud. Finalement, la vie de groupe est un autre grand facteur de motivation", explique Frédéric. De plus, comme le précise la professeure Ansseau, "quel que soit le travail qu’un écologiste va faire, il devra dialoguer avec des gens d’autres milieux. Le projet est donc une espèce de préparation de choc à la vraie vie d’écologiste. À la fois de choc et d’agrément car c’est quelque chose d’excitant et d’agréable."

Créée ici même à l’université en 1996, Écologie Sans Frontière a permis à ce jour à 36 étudiants de parfaire leur formation en écologie au cours d’un stage professionnel à l’étranger et de s’initier à la coopération internationale. Outre le projet Argentine 2003, un autre projet sera réalisé cette année au mois de mai avec le départ d’une douzaine de participants pour le Brésil.

Au cours des prochains mois, dans les pages de Liaison, les membres du groupe Argentine 2003 nous feront découvrir leur pays d’adoption et nous parlerons de leur quotidien ainsi que de l’avancement de leur projet. Liaison vous invite donc à les suivre dans cette grande aventure.

Frédéric Branch, étudiant en biologie, membre du groupe Argentine 2003, et Colette Ansseau, professeure au Département de biologie et fondatrice de l’Association Écologie sans frontières, la veille du départ des huit étudiantes et étudiants pour l’Argentine.

Photo SSE : Roger Lafontaine