Pierre Perrault

Homme de la parole

<<À l'écoute des morts chouenneuses à l'écoute aussi des vivants qui ignorent leur propre parole je dirai le beau plaisir des élisions qui allègent le discours

<<je vous guiderai parmi les frayères de mots nouveaux qui témoignent de la neige qu'ils ont vécue des psaumes qu'ils ont chantés des livres qu'ils n'ont pas lus mais qui dira jamais ce qu'ils savent de la moindre bête dans le plus petit matin d'octobre quand les arbres exemplaires dénoncent le bout du sang et j'irai à mon tour jusqu'au bout du langage restaurer les neiges qu'avons vécues à la chaleur des neiges et de l'ivoire>>

Pierre Perrault, cinéaste et poète, docteur honoris causa de l'Université de Sherbrooke, a lu un extrait d'une de ses oeuvres lors de la cérémonie du 14 juin en après-midi alors que 414 étudiantes et étudiants de la Faculté des lettres et sciences humaines et de l'École de musique ont reçu leur diplôme.

Le réalisateur des Voitures d'eau, du Règne du jour et d'Un pays sans bon sens a reçu de nombreux prix et hommages au cours de sa carrière. Diplômé en droit de l'Université de Montréal, Pierre Perrault a commencé sa carrière cinématographique vers la fin des années cinquante alors qu'il travaillait à l'Office national du film.

Jean-Pierre Kesteman, vice-recteur à l'enseignement, lui a rendu hommage : <<De Pierre Perrault, je dirai qu'il est un homme de parole, un homme de la parole, un homme nourri de la parole. (...) Homme de la parole, il l'a exprimée à travers des émissions radiophoniques et télévisées, à travers poèmes et textes dramatiques comme à travers ses oeuvres cinématographiques (...)>>

S'adressant ensuite au chancelier de l'Université, M^gr Gaumont, Jean-Pierre Kesteman a évoqué les raisons pour lesquelles il souhaitait que l'Université confère le titre de doctorat honoris causa à Jean-Pierre Perrault.

<<Parce qu'il a tenté de retracer l'histoire du Québec, d'approfondir la réalité québécoise, de chercher à découvrir des valeurs, un peuple, un génie, et ce, à une période où la honte et le dénigrement étaient monnaie courante au Québec; parce que la fraternité est liée depuis toujours à la langue, à la parenté du langage, à l'affinité du coeur, à la vision du monde; parce qu'il a dit : "Le rôle du poète est de donner à voir et à entendre, d'aider les gens à s'apercevoir de la poésie qui est autour d'eux. La poésie, c'est une clairvoyance en quelque sorte. C'est toute la vie"; parce qu'il a été un manifeste, un cri de protestation contre le mépris, parce qu'il a opposé dignité et fierté à masochisme et complexes d'infériorité, parce qu'il a révélé aux Québécoises et aux Québécois qu'ils étaient un peuple avec une identité propre.>>