Les chercheuses et chercheurs de l'Université de Sherbrooke ont obtenu beaucoup plus que leur part de gâteau à l'occasion de l'édition 1996 du Programme d'établissement de nouveaux chercheurs du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche (FCAR). Pour souligner cette réussite, LIAISON vous présente aujourd'hui le portrait d'un des neuf récipiendaires de ces subventions.

Le bruit : simplement une question de contrôle!

Bruno Paillard, professeur au Département de génie électrique et de génie informatique, a obtenu du FCAR une subvention de 14 000 $ par année durant trois ans afin de réaliser un de ses projets de recherche qui s'intitule Développement d'un nouveau type de contrôleur feedback prédictif adaptatif en vue de contrôle vibro-acoustique des structures.

Le son qui sort des conduits de ventilation vous dérange? Sachez que des moyens de haute technologie commencent à être mis en oeuvre pour rendre les appareils silencieux. Le contrôle actif du bruit ou annulation de bruit par antibruit est une technique en plein essor. Elle permet d'annuler un bruit ou une vibration nuisible en générant, à l'aide de haut-parleurs ou d'activateurs de vibration, un champ acoustique ou vibratoire de même forme et de signe opposé. Deux types de configurations de contrôle sont généralement utilisés : les contrôleurs feedforward et les contrôleurs feedback.

Feedforward ou feedback ?

<<Les contrôleurs feedforward disposent d'une information avancée sur la perturbation à annuler>>, explique Bruno Paillard. C'est-à-dire que la vibration est saisie par un capteur placé en amont dans le chemin de propagation du bruit ou de la vibration à annuler. Le contrôleur feedforward peut donc anticiper l'effet de la perturbation et réagir à temps.

Les contrôleurs feedback, quant à eux, ne disposent pas d'information avancée. Ils contrôlent les vibrations uniquement à partir de l'information dont ils disposent au point à contrôler. <<Pour cela, poursuit le chercheur, les contrôleurs feedback effectuent une prédiction de ce que sera le bruit nuisible quelques fractions de secondes dans le futur pour se donner le temps de générer l'antibruit.>>

Bien qu'il soit avantageux d'utiliser un contrôleur feedforward lorsqu'un signal de référence avancée existe, il arrive, dans un certain nombre de problèmes pratiques, que ce signal ne soit pas disponible. Par exemple, dans le cas d'un casque actif antibruit, il est très difficile de placer un capteur en amont du point à contrôler qu'est l'oreille de l'utilisateur.

Un autre ensemble de problèmes où le signal de référence n'est pas disponible constitue ce que l'on appelle les <<structures intelligentes>> où on cherche à placer capteurs, activateurs et processeurs de traitement de signal sur la même structure ou élément de structure, qu'il s'agisse de coques, de plaques, de poutres, de panneaux ou de tout autre élément susceptible d'émettre ou de transmettre une vibration ou un bruit nuisible. <<Dans ce cas de figure, le contrôleur feedback s'avère la seule solution possible malgré ses inconvénients tels que sa faible efficacité si les signaux à contrôler sont peu prédictibles ou sa capacité d'être instable>>, ajoute Bruno Paillard.

Le contrôleur feedback devra pouvoir s'adapter

Le contrôleur feedback n'est pas traditionnellement adaptatif. Il est généralement optimisé une fois pour toutes en fonction des caractéristiques du système mécanique à contrôler. Mais, dans certains cas pratiques, le système mécanique peut être variant. Par exemple, dans un système de ventilation, une trappe peut s'ouvrir et modifier la réponse acoustique des conduits. Le contrôleur doit être capable de s'adapter à ces variations.

Un nouveau type de contrôleur feedback, voilà le projet de Bruno Paillard. <<Le nouveau contrôleur sera un mélange hautement efficace des contrôleurs feedforward adaptatifs et des contrôleurs feedback traditionnels>>, précise-t-il. Cette solution permettra d'obtenir un contrôleur feedback adaptatif et naturellement stable.

Aspirateur silencieux?

Ce système sera muni de haut-parleurs antibruit, de microphones servant à assurer l'optimisation du traitement actif et d'un processeur de traitement de signal capable d'effectuer les calculs nécessaires aux hautes fréquences d'échantillonnage utilisées en acoustique.

Qui peut bénéficier d'un tel contrôleur? Au cours d'une visite des laboratoires de génie mécanique, Bruno Paillard m'a fait part des travaux en cours. La compagnie Bombardier est sur le coup et espère, grâce aux recherches, que leurs motos marines pourront être plus silencieuses. Même le secteur industriel se montre intéressé par le projet. Une entreprise leur a demandé de travailler sur une de leurs cheminées très bruyantes afin de la rendre plus silencieuse. D'ici quelques années, pourrons-nous enfin posséder un aspirateur silencieux? Souhaitons-le!

Éric Guay

Vignette

Bruno Paillard, professeur au Département de génie électrique et de génie informatique, est confiant de réussir le projet sur lequel il centre une grande partie de ses énergies.