Les étudiants étrangers : portrait de famille

Mélangez les cultures les plus variées dans une marmite étudiante, ajoutez un soupçon d'ouverture d'esprit, et vous obtenez... un potage universitaire riche et dynamisant. De quoi stimuler vos papilles interculturelles! À l'Université de Sherbrooke, une cinquantaine de pays alimentent ce bouillon de culture. Quelque 450 étudiantes et étudiants amènent la planète sur nos deux campus.

D'où viennent-ils, ces étudiants et ces étudiantes de moins en moins étrangers à mesure que le brassage culturel planétaire s'intensifie? Les statistiques fournies par Robert Sage, coordonnateur du programme des étudiantes et étudiants étrangers au Service d'animation et d'aide financière, démontrent que le continent le plus représenté est l'Afrique (62 p. 100) avec en tête le Maroc (62 étudiantes et étudiants à l'automne 1994).

Vient ensuite l'Europe, la France principalement : 90 étudiantes et étudiants, soit le groupe le plus important. Du côté de l'Asie, la Chine compte 31 représentants, mais seulement deux pour le Viêt-nam. En fait, bien plus nombreux sont ceux et celles originaires de ce pays, mais ils détiennent la citoyenneté canadienne et ne sont donc plus considérés comme étudiantes et étudiants étrangers. Cette appellation est donc réservée à ceux et celles qui ont obtenu des gouvernements canadien et québécois les autorisations de séjourner ici à titre d'étudiant. Même phénomène pour Haïti. Quant à l'Amérique latine, elle est très peu représentée (six personnes).

Pourquoi venir étudier ici?

C'est à cette question qu'ont tenté de répondre récemment deux étudiantes étrangères à la maîtrise en gestion de la productivité. Après enquête auprès de 79 étudiantes et étudiants étrangers, elles en ont conclu que le prestige lié aux études à l'étranger est un critère prépondérant pour l'ensemble de cette clientèle.

Mais d'autres raisons motivent ces personnes à poursuivre des études à l'étranger. Toujours selon la même recherche, les nationaux d'Europe semblent attirés par la découverte d'une nouvelle culture. La motivation des Asiatiques est très différente : beaucoup affirment que des pressions politiques ou sociales les ont poussés à partir de leur pays.

Près de 4000 $ par session

Quand on sait que les droits de scolarité pour les étudiants étrangers s'élèvent à 3728 $ par session sur une base de 15 crédits, on comprend l'importance des bourses. Ces bourses d'études sont offertes soit par le pays d'origine, soit par les gouvernements canadien (programme canadien de bourses de la francophonie) et québécois (programme de bourses d'excellence du gouvernement québécois). À l'automne 1994, 19 p. 100 des étudiantes et étudiants étrangers bénéficiaient de l'une ou l'autre de ces bourses.

De plus, en vertu d'ententes de coopération conclues entre le gouvernement du Québec et certains pays, un étudiant étranger peut être exempté des frais de scolarité de 3728 $. Il ne paie alors que les mêmes droits applicables à la population étudiante québécoise, soit l'équivalent d'une bourse de plus de 2800 $ par trimestre. Pour l'année scolaire en cours, 46 pays font l'objet d'une telle entente, des pays africains surtout (26) et latino-américains (13). Plus de la moitié des étudiantes et étudiants étrangers ont ainsi pu bénéficier de cette exemption l'automne dernier.

Les cycles supérieurs d'abord

Selon Robert Sage, les bourses d'études qu'offrent les différents gouvernements s'adressent principalement aux étudiantes et étudiants qui poursuivront des études de 2e et 3e cycles. À ce propos, près de sept étudiants sur dix étaient inscrits à la maîtrise ou au doctorat à l'automne 1994.

Cette concentration des étudiantes et étudiants étrangers aux cycles supérieurs explique leur âge relativement élevé : environ un sur deux a plus de 26 ans. C'est surtout vrai pour les Africains et les Asiatiques, alors que les Européens sont de loin les plus jeunes. L'étude révèle également la prédominance des hommes chez cette clientèle, du moins en ce qui concerne les citoyens de pays africains et surtout asiatiques.

Ton pays, c'est l'hiver...

Au-delà de la froideur de ces statistiques, il y a la froidure... hivernale à affronter, lorsqu'on vient d'un pays chaud. <<L'hiver constitue, malgré la fascination qu'il peut exercer chez ceux et celles qui le découvrent pour la première fois, un épisode particulièrement difficile sur le plan de l'adaptation, raconte Robert Sage. À cette difficulté s'ajoutent celles qui sont liées au fonctionnement dans un environnement social, culturel, linguistique et scolaire marqué par des différences très grandes.>> Malgré ces difficultés, les étudiantes et étudiants rencontrés lors de la recherche semblent satisfaits de leurs conditions de vie ici.

Le point de chute

Pour aider à intégrer ces hommes et ces femmes qui nous viennent d'autres <<quartiers>> du village global, des ressources existent. Robert Sage indique que la majorité passe par le programme des étudiants étrangers, au Centre de services aux étudiants. <<C'est le point de chute pour obtenir de l'information et être orienté sur les campus>>, précise le coordonnateur du programme.

<<L'Association des étudiants africains de l'Université offre également beaucoup de soutien lors de l'arrivée>>, ajoute-t-il. Trouver un logement, ouvrir un compte bancaire, faire une première épicerie, prendre l'autobus : autant de démarches parfois peu évidentes lorsqu'on arrive d'un environnement différent. L'Association aide l'étudiante ou l'étudiant qui arrive à s'y retrouver.

Le programme des étudiants étrangers facilite également l'adhésion (obligatoire) à un régime d'assurance-maladie et hospitalisation. Il offre aussi de l'aide ponctuelle, par exemple lorsque les étudiantes et étudiants sans bourse éprouvent des difficultés à payer leurs droits de scolarité. Les autres services disponibles comprennent les relations avec l'immigration, certains ministères, les ambassades, les facultés et services de l'Université, le soutien aux associations ethniques de l'Université ainsi que le soutien individuel. <<C'est au quotidien que nous essayons d'apporter notre contribution à l'internationalisation>>, conclut Robert Sage.

Michel Bury

Collaboration spéciale

Bas de vignette

Le programme des étudiants étrangers, c'est eux : Robert Sage, coordonnateur, et son bras droit, Colette Lebel. <<Nous essayons de contribuer à l'internationalisation de l'Université>>, explique le coordonnateur.

Maroc

<<Je voulais faire un doctorat, et au Maroc la recherche est limitée.>> Hasnaa Jorio étudie en génie chimique depuis trois ans. <<Ce que j'apprécie le plus ici, c'est la tolérance des gens envers les étrangers.>> Et notre fameux hiver? <<Six mois, c'est trop long!>>

Côte d'Ivoire

Ngardinga Tolna Maxime est étudiant au baccalauréat multidisciplinaire et distribue également LIAISON. Ce qu'il aime à l'Université de Sherbrooke? <<Une certaine facilité d'accès aux ressources.>> Et le plus difficile? <<Au départ, la langue. Je m'y perdais plein! Et puis, comme toute personne venant d'un pays tropical, l'hiver!>>

Viêt-nam

Étudiante au doctorat en éducation, Lê Kim Van raconte : <<Avant, j'avais une vision communiste, socialiste. Je l'ai toujours, mais j'apprends à regarder les choses comme mes amis québécois.>> La première session a été difficile, car personne n'est venu vers elle. <<Chez nous, on offre toujours un accueil chaleureux pour que la personne ne se sente pas isolée.>>