Histoire de recommandations

Le 16 octobre, la ministre de l'Éducation, Pauline Marois, annonçait qu'elle avait l'intention de suivre plusieurs des recommandations inscrites au rapport Montmarquette.

Ce rapport est en fait une étude commandée par la ministre. Le comité d'experts, présidé par Claude Montmarquette, professeur au Département de sciences économiques à l'Université de Montréal, avait comme mission de trouver des façons novatrices pour contrer l'endettement étudiant. Ce rapport a été créé pour répondre aux demandes des fédérations étudiantes. En tout, 46 recommandations sont ressorties de cet exercice.

Jusqu'à présent, Pauline Marois a retenu certaines recommandations de ce rapport. Entre autres choses, la période de remboursement différé pourrait être allongée de 18 à 24 mois. Il serait alors possible d'utiliser le remboursement différé par tranches de six mois, pendant les cinq premières années suivant la fin des études. Présentement, la possibilité de suspension ne dépasse pas 18 mois.

De plus, jusqu'à concurrence de 5000 $, les bourses d'excellence pourraient être exclues du calcul du revenu de l'étudiant. À l'heure actuelle, toute bourse supérieure à 500 $ entre dans le calcul de l'aide financière.

Conjointement avec le ministre des Finances, Pauline Marois évaluera la possibilité de créer un crédit d'impôt remboursable sur les intérêts que les gens ont dû payer lors du remboursement de leur dette d'études.

Par ailleurs, un comité consultatif en matière d'aide financière, auquel siégeraient des étudiants, pourrait être mis sur pied. Ce comité aurait pour tâche d'examiner toute proposition de modification du programme de prêts et bourses.

Même si la ministre tente d'accommoder les étudiantes et étudiants, elle doit aussi sévir. Elle s'attaque à ceux et celles qui auraient l'intention de déclarer faillite après la fin de leurs études. En 1996-1997, plus de 3700 étudiants ont dû déclarer faillite, incapables de rembourser leur dette de 12 000 $ en moyenne. De ce nombre, les trois quarts ont déclaré faillite avant même d'avoir pu bénéficier du programme de remboursement différé, ce que la ministre juge anormal. Chaque année, le gouvernement perd environ 40 millions de dollars à cause des 10 p. 100 des bénéficiaires des prêts et bourses qui se libèrent de leur engagement.

Afin de prévenir les mauvaises surprises, les étudiantes et étudiants seront davantage informés de leur niveau d'endettement. Ils recevront désormais des simulations de remboursement. De cette façon, ils auront une meilleure idée des paiements qu'ils auront à effectuer, une fois leurs études complétées.

Bien que plusieurs des recommandations du rapport Montmarquette soient applaudies par la communauté étudiante, des déceptions et des inquiétudes se font sentir. << Nous sommes déçus du fait qu'à l'intérieur de ce rapport, on ne retrouve pas ce à quoi on s'attendait, c'est-à-dire, les balises d'une loi cadre sur l'aide financière. Actuellement, la ministre a un pouvoir décisionnel. Il n'existe pas de loi pour les prêts et bourses, seulement des directives. Elle pourrait tout changer, elle en a le pouvoir>>, a mentionné Nathalie Lortie, vice-présidente aux affaires pédagogiques à la FEUS.

<<Nous espérons qu'une situation comme celle qui a suivi le rapport MacDonald en 1995 ne se reproduise pas cette fois-ci. La ministre avait seulement retenu les recommandations qui avaient pour but de récupérer des sommes d'argent>>, a-t-elle ajouté.

Réforme de l'aide financière

Le Front commun étudiant a lancé, le 28 octobre, une campagne d'envergure nationale afin de demander au gouvernement du Parti québécois de respecter les engagements qu'il a pris en 1994. Les étudiantes et étudiants ne veulent rien de moins qu'une véritable réforme de l'aide financière ainsi que le maintien du gel des frais de scolarité.

Selon Nikolas Ducharme, président de la FEUQ et porte-parole du Front commun, cette campagne se terminera seulement lorsque les modifications à l'aide financière auront été apportées.

La première phase de cette campagne consiste en la circulation d'une pétition dans les universités et les collèges de l'ensemble de la province. Cette pétition sera remise à l'Assemblée nationale à la fin novembre.

<<L'objectif visé avec cette campagne est une véritable réforme de l'aide financière qui réduira l'arbitraire des prises de décision de la ministre de l'Éducation en matière d'aide financière et de frais de scolarité et surtout, qui sera mieux adaptée au conditions socioéconomiques actuelles des étudiants>>, a déclaré Nikolas Ducharme. Pour cette raison, le Front commun étudiant demande à ce que soit mis sur pied un mécanisme de consultation des étudiantes et étudiants, chargé d'étudier toutes les modifications à la Loi sur l'aide financière.

Voici la liste des principales recommandations des étudiantes et étudiants au sujet de la Loi sur l'aide financière et des frais de scolarité :

- Établir un mécanisme de consultation multipartite avant chaque modification à l'aide financière et aux frais de scolarité;

- instaurer un règlement sur les frais de scolarité qui les fixerait au niveau actuel;

- amorcer une réforme du régime d'aide financière qui inclurait la révision du calcul des contributions de l'étudiant, des parents et du conjoint, l'indexation des frais de subsistance et des bourses, l'assouplissement des modalités de remboursement des prêts et l'accès à l'aide financière sous forme de prêts pour les étudiantes et étudiants à temps partiel (le Québec est la seule province à ne pas avoir un programme pour les étudiantes et étudiants à temps partiel);

- rétablir le critère d'indépendance financière des étudiantes et étudiants ayant obtenu plus de 90 crédits dans un même programme universitaire;

- réactualiser le programme de remise de dette;

-assurer la gratuité scolaire au collégial;

- proposer une alternative aux frais différentiels pour les étudiantes et étudiants internationaux et canadiens non résidents.

Sherbrooke dans tout cela...

Lourdement endettés, les étudiantes et étudiants prétendent que les modalités du régime de l'aide financière ne répondent plus à leur réalité. À L'Université de Sherbrooke, 75 p. 100 de la population étudiante dépend directement de l'aide financière. Pour plusieurs, le régime des prêts et bourses est leur principale source de revenu. Les étudiantes et étudiants veulent que le régime s'ajuste à la nouvelle réalité étudiante. <<Le travail de la Fondation Force est remarquable, mais il est malheureux que la responsabilité de l'État doive être comblée par une initiative étudiante>>, a fait remarquer Julie Roy, présidente de la Fédération des étudiants de l'Université de Sherbrooke.

La pétition circule présentement à l'Université comme partout ailleurs dans les collèges et les universités du Québec. Présentement, quelque 1500 noms ont été amassés à l'Université de Sherbrooke. Ne reste plus qu'à attendre les réactions de l'Assemblée nationale...

Virginie Duval

Vignette

<<La ministre Marois a un pouvoir décisionnel. Il n'existe pas de loi pour les prêts et bourses, seulement des directives. Elle pourrait tout changer, elle en a le pouvoir>>, a mentionné Nathalie Lortie, vice-présidente aux affaires pédagogiques à la FEUS.