Espèces d'espaces

Il se trouve que, pendant de nombreuses années, Louise Masson a représenté la nature, d'abord en cherchant à transposer sa réalité objective, puis en s'éloignant progressivement d'une représentation fidèle de façon à créer une distance avec elle.

Cette distance lui a permis de produire un espace favorable à l'expression individuelle d'une expérience de la nature, plus à même de rendre compte des sensations intérieures. Dans les peintures de cette exposition, la nature est toujours présente, mais comme une mémoire, comme quelque chose de vécu qui serait traduit dans le choix des formats, des formes et des couleurs. De cette représentation de la nature, il reste des couleurs référentielles, comme les bruns et les verts, rappelant la terre et la végétation.

Les bandes horizontales peuvent évoquer le sol; les verticales, pour leur part, peuvent référer au motif de l'arbre, reconnaissable dans plusieurs peintures précédentes de l'artiste. Certainement l'arbre, comme figure dressée dans un environnement naturel, engage notre propre verticalité dans un processus d'identification. De l'arbre à l'individu qui s'y conforme, peut-être davantage grâce à l'épuration de la forme verticale moins restrictive, cette position occupée dans l'espace est en question.

De plus, les grandes dimensions des oeuvres suggèrent de vastes étendues d'espaces que la couleur terreuse des surfaces ramène décidément du côté de la nature. La rencontre des axes fait alors penser à des chemins, à des intersections qui découperaient un territoire. En effet, ces bandes verticales et horizontales sont plus que des lignes, elles fonctionnent comme des couloirs, des espaces de circulation, elles aménagent des entrées et des sorties dans l'oeuvre, dans lesquelles le regard s'engage à son aise.

L'exposition sera présentée dans le Hall du Pavillon central jusqu'au 9 mars.

Sylvie Parent